Sunday, January 12, 2025
HomeINTERNATIONALEtats-UnisL’ancien président américain Jimmy Carter est mort à l’âge de 100 ans

L’ancien président américain Jimmy Carter est mort à l’âge de 100 ans

Washington – En soins palliatifs depuis février 2023 dans sa résidence de Plains, en Géorgie, le 39e président des États-Unis, Jimmy Carter, a rendu son dernier souffle dimanche, a annoncé sa fondation. Il avait 100 ans (né le 1er octobre 1924).

Sa compagne pour 77 ans, Rosalynn Smith, l’ancienne première dame, avait quitté ce monde un an avant lui, le 19 novembre 2023, à l’âge de 96 ans.

Président n’ayant exercé qu’un seul mandat — une chose rare aux États-Unis —, Jimmy Carter a siégé à la Maison-Blanche entre 1977 et 1981, une période plutôt cahoteuse durant laquelle il a dû affronter, malgré son manque d’expérience en politique, une crise énergétique majeure, une inflation coriace, le déclenchement d’une guerre en Afghanistan, ainsi que la crise des otages américains en Iran.

Au terme de ses quatre années au pouvoir, il a été rejeté par l’électorat américain, durement frappé par un pouvoir d’achat en baisse et par la hausse des taux d’intérêt, qui lui a préféré la posture plus optimiste adoptée durant la campagne électorale par la vedette de cinéma et candidat républicain Ronald Reagan.

C’est surtout après sa présidence que le politicien va finalement obtenir une reconnaissance internationale pour sa contribution à la défense de la démocratie et des droits de la personne, pour le développement économique et social, mais également pour son implication dans le dénouement de plusieurs crises au Moyen-Orient et entre les États-Unis, la Libye et la Corée du Nord. Un parcours post-présidentiel riche, qui lui a valu un prix Nobel de la paix en 2002.

Originaire de la ville de Plains, dans le sud ségrégationniste de la Géorgie, Jimmy Carter entre en politique vers la fin de la trentaine en se faisant élire sénateur local en 1963. Cette fonction permet alors à ce jeune élu, propriétaire de la ferme d’arachides familiale qu’il a reprise après la mort de son père en 1953, en compagnie de sa femme, Rosalynn Smith, d’aiguiser les idées d’ouverture et d’inclusion qu’il cultivait depuis des années dans son environnement social.

À contre-courant du discours ségrégationniste bien ancré dans cet État sudiste à l’époque, Jimmy Carter a milité autant pour faire abroger les lois visant à décourager les Afro-Américains de voter — un combat qui a toujours cours aux États-Unis en 2025 — que pour rendre l’appareil gouvernemental moins lourd et plus efficace.

Ces politiques vont l’exposer à une première défaite en 1966, lorsqu’il cherche à devenir gouverneur de la Géorgie : l’électorat blanc conservateur se mobilise massivement en faveur de son opposant, Lester Maddox, figure forte du mouvement ségrégationniste.

Jimmy Carter sera finalement élu gouverneur quatre ans plus tard, au terme d’une campagne durant laquelle il va apprendre à courtiser la frange raciste de son électorat pour, une fois élu, mieux appeler à faire de la ségrégation raciale une époque révolue. « Vous n’aimerez pas ma campagne, mais vous aimerez mon gouvernement », avait-il d’ailleurs dit, durant sa campagne, à l’avocat afro-américain et défenseur des droits civiques Vernon Jordan, relate son biographe Kai Bird dans The Outlier, paru en 2021.

Sortir de l’inconnu
En 1974, le jeune gouverneur prend la route de la Maison-Blanche avec une campagne aussi timide qu’incertaine qui, deux ans plus tard, ne laisse pourtant guère d’espoir à l’aspirant président, crédité d’à peine 4 % des intentions de vote au commencement des primaires démocrates de 1976. Sa Peanut Brigade, des militants partis de la Géorgie pour convaincre les démocrates des autres États de voter pour cet inconnu sur la scène politique nationale, contribuera en partie à déjouer les pronostics.

Après sa victoire face à des membres de l’élite démocrate comme le Californien Jerry Brown ou le « p’tit gars de l’Alabama » George Wallace, Jimmy Carter va prendre la tête de la course présidentielle face au républicain sortant Gerald Ford, devenu président après la démission spectaculaire de Richard Nixon en 1974.

Le climat politique, entaché par la crise du Watergate et ses conséquences sur la chute du républicain, va d’ailleurs jouer en faveur de Jimmy Carter, qui va réussir à se distinguer comme le candidat évident de la rupture avec l’élite politique de Washington, salie par deux longues années de révélations et d’attaques âpres de part et d’autre de la Chambre. Avec une minuscule majorité du vote populaire, 50,1 %, le démocrate va ainsi devenir le premier politicien originaire du Deep South, le Sud profond des États-Unis, à accéder à la Maison-Blanche depuis la guerre civile américaine.

Sa « fraîcheur » ne restera toutefois pas un atout très longtemps. Elle deviendra même un handicap pour le nouveau président, qui se montre très vite incapable de conclure des accords avec le Congrès pour faire avancer ses politiques économiques et sociales, dont le pays, qui s’enfonce dans l’une de ses pires récessions depuis les années 1930, a pourtant grand besoin.

Tout en faisant face à un effondrement économique qui nourrit le malaise des Américains face à leurs institutions et à leurs dirigeants, Jimmy Carter va devoir affronter une succession d’autres crises, internationales celles-là, qui vont mettre à l’épreuve ses aptitudes naissantes de négociateur et, surtout, finir par miner rapidement la confiance des Américains à son endroit.
Des politiques controversées

Le démocrate va régulièrement attiser la critique. Il va le faire, à titre d’exemple, en signant en 1979 un nouveau traité qui prévoit de redonner le contrôle du canal de Panama aux autorités locales 20 ans plus tard, en 1999. Le geste est perçu par la frange républicaine conservatrice comme l’abandon d’un atout géostratégique important pour Washington dans cette région, et ce, même si, rétrospectivement, cela aura permis d’éviter un conflit majeur en Amérique centrale.

Jimmy Carter va également soulever la controverse en répondant timidement à l’agression soviétique contre l’Afghanistan ou encore en établissant des relations diplomatiques avec le régime communiste de Pékin, aux dépens des liens tissés par le passé avec Taïwan. « Cette normalisation [des relations sino-américaines] est à la base de l’économie mondialisée », a rappelé un autre de ses biographes, Jonathan Alter, à l’automne 2021, dans les pages du Washington Monthly. « Carter pense d’ailleurs que c’est la chose la plus importante et la plus durable qu’il ait accomplie en étant au pouvoir. »

Sa présidence sera toutefois fortement marquée par la crise des otages de l’ambassade américaine à Téhéran, provoquée par la théocratie naissante dans la foulée de la chute du shah. La tentative désastreuse pour les sauver, en 1980, donnera des munitions à son opposant républicain Ronald Reagan lors de la présidentielle de l’année suivante. Ironiquement, c’est une fois défait que Jimmy Carter va réussir à négocier la libération de ces 50 hommes et femmes, qui vont regagner les États-Unis dans les derniers jours de la présidence du démocrate.

À 100 ans, Jimmy Carter, qui a célébré son ultime anniversaire le 1er octobre dernier, était non seulement le plus âgé des ex-présidents américains toujours vivants, mais également l’un des élus dont les valeurs humanistes et les vertus de leurs politiques ont été davantage reconnues après que durant sa présidence. En 2021, le Presidential Historians Survey, qui fait un classement des présidents américains des meilleurs aux pires, le plaçait en 26e position, devant George W. Bush, Richard Nixon et Donald Trump, qui avait fait son entrée dans la liste en 2021 parmi les quatre pires présidents américains à ce jour.

- Advertisment -

LES PLUS RECENTES