Wednesday, April 24, 2024
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Pour une justice électorale saine, célère et impartiale

L’Observatoire Citoyen pour l’Institutionnalisation de la Démocratie (OCID) constate, avec consternation, les conséquences néfastes actuelles du déficit de rigueur, d’équité, de transparence et de crédibilité du processus électoral de 2015 sur le climat politique et la situation socio-économique du pays. L’OCID se sent interpellé par les appels et les aspirations de toutes les couches de la population haïtienne à une justice électorale saine, célère et impartiale. C’est en ce sens qu’il s’est particulièrement intéressé, au cours des derniers mois, à collecter des données auprès des juridictions de la république pour comprendre dans quelle mesure elles ont assuré la répression efficace et effective des infractions à la loi électorale.
En effet, le chapitre XIII du Décret électoral de 2015, soit les articles 189 à 219, présente un éventail de contraventions, délits et crimes pouvant être commis dans le contexte électoral ainsi que les sanctions pénales y afférentes. Devant l’ampleur des incidents survenus lors des élections du 9 août et du 25 octobre 2015, et compte tenu du nombre significatif d’arrestations effectuées par les autorités policières, l’OCID a cru nécessaire de s’enquérir de l’état d’avancement de ces dossiers et du suivi assuré par les autorités judiciaires pour punir les coupables et dissuader les gens de commettre de tels forfaits à l’avenir.

Résultats de l’enquête menée auprès des parquets de la république

Du 28 mars au 11 avril 2016, les 18 coordonnateurs régionaux de l’OCID ont réalisé une enquête auprès des parquets des tribunaux de première instance du pays dans le but de faire le suivi des cas d’arrestation enregistrés lors des journées électorales du 9 août et du 25 octobre 2015. Des 18 commissaires et substituts commissaires interrogés, un seul (celui de Mirebalais) n’a pas répondu aux questions des enquêteurs. Les informations recueillies permettent de déterminer le statut judiciaire actuel des individus appréhendés et l’état des lieux de la répression des infractions au Décret électoral.

A l’occasion des élections des 9 août et 25 octobre 2015, les dix-sept parquetiers ont fait état de 208 prévenus déférés par devers eux pour des infractions à la législation électorale : un au parquet de l’Anse-à-Veau, 7 à Aquin, 3 au Cap-Haïtien, 3 aux Coteaux, 24 à Croix-des-Bouquets, 5 à Fort-Liberté, 12 aux Gonaïves, 12 à Grande Rivière du Nord, 4 à Hinche, 4 à Jacmel, 7 à Jérémie, un à Miragoâne, 34 à Petit-Goâve, 75 à Port-au-Prince, 4 à Port-de-Paix et 12 à Saint-Marc. Aucun cas n’a été signalé par le parquet des Cayes.

Concernant la nature des infractions à la loi électorale reprochées à ces 208 individus, il s’agit de 116 cas pour des contraventions, 73 pour des délits et 11 pour des crimes. Les parquetiers interrogés n’ont pas fourni d’informations à propos de 8 des cas d’arrestation. Quant au suivi réalisé par les parquets sur des cas d’arrestation, les magistrats debout interrogés ont signalé 22 cas de renvoi au cabinet d’instruction, 35 renvois au tribunal correctionnel et 55 libérations. Il est à signaler que la plupart d’entre eux se sont abstenus de se prononcer sur le statut actuel de 96 cas d’arrestation. Précisons que, selon les parquetiers interrogés, 16 des prévenus ont été condamnés et 152 ont été relaxés. Pour les 40 autres cas, les informations n’ont pas été communiquées par les répondants.

S’agissant des contraintes auxquelles les parquetiers ont dû faire face dans leur travail visant à réprimer les infractions électorales, deux d’entre eux (ceux de la Grande Rivière du Nord et des Gonaïves) ont affirmé avoir été l’objet de menaces ou d’intimidations venant de parlementaires ou de partis politiques. Par ailleurs, sept Commissaires et Substituts Commissaires ont révélé n’avoir reçu aucune formation spéciale portant sur la législation électorale. Dans les 10 autres parquets, les intéressés ont dit avoir bénéficié d’une formation spécifique dans cette discipline sous les auspices de l’École de la magistrature, du Ministère de la justice, du CEP, du CSPJ, de l’USAID ou de la MINUSTAH.

Recommandations

L’OCID croit nécessaire, pour le nouveau Conseil Electoral, le CSPJ, l’actuel Gouvernement et le Parlement, de travailler au renforcement des mécanismes juridiques et judiciaires du système électoral. Face aux problèmes de moyens, de corruption et de formation rencontrés par les parquetiers, l’OCID propose, entre autres, de renforcer la sécurité des Commissaires/Substituts, de renforcer l’indépendance des parquets par rapport à l’exécutif, d’améliorer la collaboration des membres des Bureaux de vote, des Centres de vote et de la Police avec la justice, d’améliorer les moyens de déplacement, d’organiser des séances de formation pour les acteurs impliqués dans le processus et d’organiser des séances de formation sur la loi électorale pour les acteurs judiciaires. Il recommande également que les décisions de justice rendues à l’encontre des contrevenants à la loi électorale soient publiées, de manière à dissuader les individus qui auront voulu s’engager sur la même voie dans le futur.

L’Observatoire salue la démarche engagée par le CEP consistant en la formation des futurs juges électoraux et l’élaboration d’un Code d’éthique et de déontologie électorale et d’un Manuel de règlements et de procédures pour le contentieux électoral. L’OCID encourage les Conseillers à tout mettre en œuvre pour crédibiliser le processus.

Dans la même veine, l’OCID encourage les membres de la Commission Indépendante d’Evaluation et de Vérification Electorale à prendre toute la mesure de la délicate mission qui leur est assignée et à faire preuve d’ouverture, d’impartialité et de fermeté. Le Consortium croit essentiel pour les acteurs politiques de trouver un consensus formel autour de la méthodologie que la commission doit utiliser et de l’acceptation des résultats de son travail, moyennant le respect de la démarche préétablie et la transparence du processus.

L’Observatoire Citoyen pour l’Institutionnalisation de la Démocratie (OCID), consortium de la société civile formé de l’Initiative de la Société Civile, du Centre Œcuménique de Droits Humains et de JURIMEDIA, renouvelle son engagement à travailler à la consolidation de la démocratie en Haïti et, en particulier, à l’instauration d’un système électoral garantissant aux citoyens haïtiens de pouvoir choisir librement et démocratiquement leurs dirigeants.

« Une démocratie pérenne par la vigilance citoyenne »

Membres du Comité de Pilotage

Sylvie BAJEUX

Pour le Centre Œcuménique des Droits Humains (CEDH)

Abdonel DOUDOU

Pour JURIMÉDIA

Rosny DESROCHES

Pour l’Initiative de la Société Civile (ISC)

Pour authentification: Rosny DESROCHES (34466167) et Abdonel DOUDOU (38790493).

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