Thursday, March 28, 2024
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L’Amérique de Donald Trump: Voilà les indicateurs qui annoncent un régime autoritaire

Ce n’est pas parce que les États-Unis sont aujourd’hui une démocratie qu’ils le resteront éternellement
Sur le plan de la politique étrangère, il y a de bonnes raisons d’avoir peur de Donald Trump, mais il y en a aussi d’autres de croire qu’il ne fera pas pire que certains de ses prédécesseurs. Pour sûr, sous George W. Bush, les néoconservateurs aux manettes pouvaient se targuer d’une grooosse expérience, ce qui ne les a pas empêchés de tout saccager sur leur passage. Face à Donald Trump, mes craintes ont toujours été doubles: que ses objectifs stratégiques puissent être relativement sensés, mais qu’il les mette en œuvre avec une telle incompétence qu’il finisse par affaiblir la position des États-Unis dans le monde; ou alors qu’il se fasse embabouiner par les grosses légumes d’usage et répète les mêmes erreurs que le crétin du Texas.
Au vu de ses premiers choix –comme la nomination de l’islamophobe Michael Flynn au poste de conseiller pour la sécurité intérieure–, on pourrait même obtenir le pire des deux mondes: l’irrationalité des objectifs et la stupidité de leur réalisation.

Sauf que pour les Américains, il y a un autre vrai motif d’inquiétude: la menace que Trump représente pour l’ordre constitutionnel des États-Unis. Son lourd et long passif dans les affaires indique qu’il est un homme rancunier, prêt à tout pour punir ses concurrents et capable de rompre une promesse en un clin d’œil, sans le moindre remord. Sa campagne présidentielle aura prouvé le peu d’estime qu’il a pour les normes et les règles existantes –il a refusé de publier sa déclaration fiscale, multiplié les mensonges, prétendu que le système électoral et politique était «truqué» à ses dépens, menacé de jeter en prison son adversaire, entre autres et nombreuses infractions– et révélé tout le mépris qu’il conçoit autant pour ses opposants que pour ses partisans. Et croyez-vous qu’il regrette ce qu’il a pu dire ou faire d’odieux durant sa campagne? Pas le moins du monde, vu qu’il a «gagné», pour citer son interview post-élection dans le Wall Street Journal. Pour Trump, semble-t-il, la fin justifie réellement les moyens.

 

Pour aggraver encore un peu plus la situation, dans son entourage, beaucoup sont persuadés que l’Amérique est aujourd’hui assiégée par des hordes de gauchistes, de gens de couleur, d’immigrés divers et variés et d’obscures influences étrangères. Ils savent aussi que la démographie ne leur est pas favorable: les Républicains ont perdu le vote populaire lors de six des sept dernières élections (Bush 2004 ayant été l’exception) et la proportion d’hommes blancs d’un certain âge constituant l’assise du parti va poursuivre son déclin. Un contexte qui en incitera certains à s’agripper au pouvoir par tous les moyens possibles, légitimés par leur (fausse) croyance d’un pays à «sauver» de ses prétendus ennemis.

Qu’on y ajoute le goût avoué de Trump pour les hommes «forts» comme Vladimir Poutine et les funestes conseillers dont il s’entoure –à commencer par le suprémaciste blanc Stephen Bannon– et vous avez la recette d’un bon rejet de la démocratie. En voyant l’obsession personnelle de Trump pour la «gagne» et la terreur qu’il peut ressentir face à l’humiliation, je m’interroge sur sa possible réaction lorsque son taux de bonnes opinions s’écroulera, que le marché obligataire piquera du nez ou qu’il sera incapable de réaliser ses promesses. Tous les présidents subissent des revers d’opinion –ce fut le cas pour Richard Nixon, Ronald Reagan, Bill Clinton, les deux Bush, Barack Obama, sans oublier Abraham Lincoln et Franklin D. Roosevelt. Il n’y aura pas d’exception pour Trump. Lorsque son taux d’opinions favorables sera dans les choux et que même un Congrès sous contrôle républicain ne voudra pas satisfaire ses caprices, va-t-il s’adapter et tenir la barre –comme le font tous les présidents normaux– ou va-t-il jouer le tout pour le tout et chercher des moyens de s’isoler?

La responsabilité publique est inhérente au système constitutionnel américain, mais rien ne dit que Trump n’essayera pas d’y échapper. Sur ce plan, ce n’est pas comme si les modèles manquaient. En Russie, si Poutine a pu remporter une série d’élections et conserver un taux de satisfaction élevé, c’est notamment parce qu’il aura éliminé, intimidé ou marginalisé quiconque susceptible d’affaiblir sa mainmise sur le pouvoir, tout en gavant au quotidien le peuple russe de propagande pro-Kremlin. En Turquie, la stratégie de Recep Tayyip Erdogan est comparable, avec une exaltation du conservatisme des campagnes, une mise au pas de la presse et l’exploitation de toutes les opportunités possibles et imaginables d’arrêter, menacer, réprimer ou même d’éliminer opposants et critiques. La formule est aussi appliquée, quoique dans une moindre envergure, en Hongrie et en Pologne, et elle n’est pas sans rappeler le règne depuis peu achevé de Silvio Berlusconi, qui n’aura cessé de se faire réélire malgré un bilan désastreux de Premier ministre et sa condition avérée de prédateur sexuel.

Le diagnostic pourrait vous sembler alarmiste. Il est effectivement tout à fait possible que Trump respecte son serment de défense de la Constitution et ne s’écarte jamais de la ligne légale. Mais vu ses agissements passés, son état d’esprit manifeste et ses conseillers belliqueux, il est à mon sens assez légitime d’estimer en péril l’ordre prévalant aux États-Unis depuis plus de deux siècles, ce qui devrait préoccuper tous les Américains. Certes, la réalité constitutionnelle n’a jamais correspondu aux espoirs et aux idéaux des Pères Fondateurs, mais la qualité d’autocorrection du système aura bien servi la nation américaine. Mieux encore, c’est grâce à la Constitution que les États-Unis ont pu se préserver des excès autodestructeurs et des injustices extrêmes si fréquents dans les régimes autoritaires.

J’insiste: je ne dis pas que ce sombre scénario d’une démocratie subvertie est probable, seulement qu’il est loin d’être impossible. La démocratie s’est délitée dans plusieurs pays et rien ne permet d’estimer les États-Unis vaccinés contre ce danger. Pour un bon aperçu de l’état de la science politique sur ce sujet, consultez la salutaire liste de Jeff Colgan, professeur à Brown.

La bonne nouvelle, c’est que les États-Unis ne connaissent pas les principaux facteurs de désintégration démocratique: le pays n’est pas pauvre, ses institutions sont anciennes et il n’est pas au beau milieu d’une crise économique majeure. La mauvaise nouvelle, c’est que les États-Unis possèdent un système présidentiel (a priori plus propice à la dictature que les systèmes parlementaires) où, qui plus est, l’exécutif n’a cessé de gagner en autorité. Sans compter que jamais, au grand jamais, nous n’avons eu de président un tantinet comparable à celui qui vient d’être élu.

Au vu des enjeux en présence, le mieux que nous ayons à faire est de faire attention aux éléments factuels attestant du virage autoritaire négocié par Trump et son entourage. Pour tous ceux qui aiment les États-Unis et leur Constitution plus qu’ils n’apprécient un parti ou une personnalité politiques spécifiques, j’aimerais faire œuvre de service public avec cette liste en dix points –dix signes annonciateurs d’une démocratie en péril en Amérique.

Stephen M. Walt (SLATE)

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