Saturday, April 20, 2024
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Le Directeur du Conatel à la réunion de la CITEL

Discours du Directeur Général du CONATEL, Monsieur Marcelin Montaigne à la 5ème réunion ordinaire de la Commission Interaméricaine de Télécommunications (CITEL)
Au nom du peuple haïtien, je voudrais remercier chacun de vous ici pour cette grande sympathie et cette solidarité que vous avez tous sans exception manifestées à son égard après ce tragique 12 janvier 2010.

Discours du Directeur Général du CONATEL, Monsieur Marcelin Montaigne à la 5ème réunion ordinaire de la Commission Interaméricaine de Télécommunications (CITEL)
Au nom du peuple haïtien, je voudrais remercier chacun de vous ici pour cette grande sympathie et cette solidarité que vous avez tous sans exception manifestées à son égard après ce tragique 12 janvier 2010.

Au nom du secteur des télécommunications, je voudrais particulièrement remercier le Secrétaire General de la UIT, le Dr Hamadoun Touré pour son soutien effectif, Je voudrais adresser mes remerciements aux responsables de la FCC pour leur accompagnement ainsi qu’à nos amis et collègues de la République Dominicaine qui, dès le soir du 12 janvier s’étaient mobilisés pour nous apporter leur concours, Je n’aurai pas le temps de citer tout le monde, mais  sachez tous que chaque geste a été apprécié. Malheureusement le malheur n’a pas seulement frappé notre pays. Apres que nos amis du Chili se soient portés à notre secours, voilà qu’ils devaient subir le 27 février au matin, les effets dévastateurs d’un séisme de magnitude 8.8, Nous adressons nos plus vives sympathies au peuple chilien à travers la délégation chilienne ici présente. Le 12 janvier comme le 27 février 2010 nous ont permis de comprendre  que du Canada à l’extrême pointe Sud de l’Argentine, nous ne sommes que des cultures différentes partageant un même espace de solidarité traversé par des problèmes communs réels.

Monsieur le Secrétaire Exécutif de la CITEL,

Je voudrais profiter de cette opportunité pour vous demander de transmettre au gouvernement mexicain comme aux représentants des nations accréditées à cette cinquième assemblée de la CITEL, les plus vives remerciements de la République d’Haïti pour l’avoir désignée au poste de Vice-président. Sachez que la République d’Haïti s’acquittera de cette tache avec honneur et efficacité. Promouvoir une société de l’information et de la connaissance équitable et juste à travers l’ensemble de l’Amérique Latine, telle sera désormais notre cheval de bataille sur la scène internationale. Ce combat, loin de nous distraire de nos préoccupations les plus pressantes en Haïti vient au contraire nous renforcer et nous donner des moyens d’action bien plus importants qu’auparavant. A tous, nous vous disons merci.

Mesdames et Messieurs,

Le 12 janvier 2010, ce sont près de 300.000 de mes compatriotes qui ont perdu leur vie. Les statistiques ont montré que le même séisme aurait produit seulement quelques dizaines de morts dans un pays économiquement plus avancé et mieux préparé. Le cas du Chili avec moins de 200 morts dus au séisme lui-même en est une bonne illustration. Parlant de la tragédie haïtienne, le Premier Ministre haïtien eut à déclarer que « l’ampleur de la dévastation est largement attribuable à la densité trop forte de la population, à la sur centralisation des activités politiques, économiques et administratives dans la capitale, à des normes de construction inadéquates, pour ne pas dire inexistantes. » Fin de citation

En effet, Haïti s’est durant trop longtemps assimilé uniquement à la République de Port-au-Prince, seul endroit du pays où l’on pouvait trouver de bonnes écoles, des espaces de loisirs, des opportunités réelles d’émancipation.  Il en est résulté une forte migration en direction de Port-au-Prince et la désaffectation des autres villes. La grande majorité des Haïtiens vivent aujourd’hui le long des failles sismiques dans des constructions aussi inappropriées que celles de Port-au-Prince, sans aucun moyen de réhabiliter leur environnement.

Notre réseau actuel de télécommunications a aussi négligé les villes de province. Celles-ci ne bénéficient d’aucun service à large bande, de telle sorte qu’il est absolument difficile de faire des télécommunications un espace d’opportunités pour la création d’emplois. Les TIC se sont au contraire, étendus de manière non équitable sur le territoire haïtien, accentuant les inégalités économiques et sociales existantes.

Après avoir tout perdu à Port-au-Prince, beaucoup des victimes du séisme se sont rendus dans les villes de province pour trouver le support de leur famille, fragilisant encore plus les faibles structures économiques de ces communautés. Ceci amène la crainte de les voir revenir accentuer la bidonvilisation de Port-au-Prince, cette fois, en compagnie de ceux qu’ils ont appauvris dans les villes de Province. C’est dans cette optique que les enjeux majeurs de l’après 12 janvier ont été clairement énoncés par le Premier Ministre Haïtien. Le premier enjeu adresse le problème du déploiement de la population sur l’ensemble du territoire et la capacité de placer le pays et chacune de ses régions dans un réseau ouvert sur des partenaires internationaux et sur des liens économiques avec l’étranger.

Le second enjeu, cité par le Premier Ministre, est celui de l’environnement vu sous la perspective de la reconstitution d’un pays fragilisé, plus vulnérable qu’il ne le devrait aux catastrophes naturelles et à la pression exercée sur nos ressources renouvelables.

Le troisième enjeu est celui de la gouvernance et de notre capacité d’adapter nos structures politiques et administratives à la réalité du 21ème siècle, de reconquérir la confiance des citoyens dans l’Etat.

Face à ces enjeux, comment repenser aujourd’hui Haïti différemment pour des résultats différents ? Albert Einstein disait que la folie, c’est se comporter de la même manière et s’attendre à un résultat différent. On ne peut certainement pas espérer en reconstruisant la vie Haïtienne telle qu’elle était avant le 12 janvier obtenir des résultats différents des tragédies des cyclones Jeanne, … puis du séisme du 12 janvier. Le Président de la République d’Haïti a clairement défini les nouvelles lignes directrices de l’action publique :

   1. Mise en œuvre de la décentralisation telle que prônée par la Constitution haïtienne

   2. 90% des investissements publics dans le développement et la reconstruction doivent aller à des projets en dehors de Port-au-Prince.

Les grands contours de la nouvelle pensée qui doit désormais guider l’action de tout un chacun après le 12 janvier, ont été aussi définis par le Chef de l’Etat Haïtien au cours d’une rencontre avec les Chefs d’Etat d’Amérique Latine au mois de février dernier. Nous allons refonder Haïti, avait déclaré le Chef de l’Etat.

Refonder la nation signifie : réviser les schèmes culturels, les valeurs à partir desquels nous avons fonctionné, revoir nos ambitions et nos objectifs, revoir nos modèles organisationnels, questionner le cadre de formation de nos ressources humaines, ajuster l’équipement de nos villes et villages, etc.. Tout un programme.

Comment les TIC, les Telecommunications peuvent-elles aider à la refondation de la nation haïtienne ?

D’abord, en donnant à chaque Haïtien ce qui lui a fait le plus défaut avant le 12 janvier 2010 : un grand projet auquel il s’identifie, un projet haïtien qui l’amène à croire dans son futur, dans son pays, qui lui redonne son statut de citoyen et dans lequel il peut, chaque jour apporter sa contribution. Un projet dont il peut évaluer les progrès et l’impact sur son quotidien. Un projet dont les résultats espérés à court et moyen terme sont : la création de richesses et de plus-values économiques dans les collectivités territoriales, la création d’emplois, la transformation de l’habitat haïtien par la constitution d’espaces attrayants à travers laquelle nos compatriotes peuvent trouver la qualité de vie que certains vont souvent chercher ailleurs, l’accès équitable aux opportunités économiques et sociales

Les TIC doivent donc attaquer le problème de l’abandon des villes, de la bidonvilisation de l’espace haïtien, de l’inexistence de réelles opportunités dans les provinces, le manque d’intérêt du jeune Haïtien pour son pays. Les TIC doivent conceptualiser, synthétiser et créer un cadre de mise en œuvre du besoin d’être Haïtien dans un monde moderne, compétitif.

Voilà pourquoi et comment le Conatel, de concert avec la Fédération des maires d’Haïti et certaines associations locales du secteur des affaires à lancer un ambitieux chantier, celui de transformer toutes les villes moyennes haïtiennes qui en ont le potentiel, en de véritables Pôles TIC de développement ou encore des POLTIC

L’objectif principal de ce vaste programme ou chantier qui doit le plus vite que possible, toucher tous les Haïtiens est de créer grâce aux TIC, un écosystème favorisant un développement durable intégré et décentralisé dans chaque ville moyenne d’Haïti.

Pour réussir, POLTIC doit d’abord engager les jeunes Haïtiens et leur permettre de croire en eux-mêmes, en leur capacité à transformer leur vie. Il doit être pour chaque Haïtien, l’espoir de voir émerger  une Haïti dans laquelle il se sent pris en compte, protégé et encadré dans sa quête d’une vie de qualité pour sa famille. POLTIC se veut un projet national, dont l’articulation se fait au niveau local. C’est surtout un projet de proximité touchant des communautés de moins de 50,000 habitants, afin d’en faciliter l’appropriation par chaque citoyen.

Comment les TIC peuvent-elles apporter le développement dans une communauté haïtienne ?

D’abord, en mettant en réseaux les projets, efforts et initiatives et en facilitant leur intégration. En contribuant certainement à atteindre la masse critique d’acteurs nécessaires à leur décollement par la mise en œuvre d’une bonne stratégie d’équipement et d’organisation des communautés. Les TIC doivent permettre la création de nouveaux emplois durables, et augmenter le potentiel de vente de la production agro-industrielle, artisanale, grâce à la vente en ligne. L’utilisation de l’Internet dans le marketing des richesses naturelles, culturelles ou patrimoniales des villes permettra d’y attirer les touristes, moyennant une prise en charge et organisation appropriée.

12 villes d’Haïti ont été sélectionnées pour un projet pilote. Dans chacune de ces villes, un comité de gestion présidé par le maire et comprenant les représentants des principaux acteurs est en train de voir le jour. Six niveaux d’interventions sont à prévoir dans les villes sélectionnées

Premièrement, celui des TIC dans le renforcement et l’efficacité de la gouvernance locale.  Actuellement, les mairies jouent un rôle effacé dans la problématique de la protection des citoyens contre les risques et désastres. Ils n’ont aucun outil d’information à leur disposition pour contribuer à l’information et la formation des citoyens et faire valoir les orientations sociales et économiques qu’ils ont déterminées. Les villes d’Haïti doivent se faire plus accueillantes, répondre à des normes d’urbanisme minimales pour être plus vivables, pour offrir des opportunités d’investissements et d’emplois, et contribuer elles-mêmes à la décentralisation. Atteindre de tels objectifs relève de la compétence des maires qui doivent engager leurs administrés. C’est pourquoi POLTIC équipera chaque ville d’une station de radio municipale FM dont les programmes pourront être élaborés de manière collaborative entre les mairies, les universités, les associations économiques et sociales.

Deuxièmement, celui de l’équipement des villes. L’une des réponses que le Conatel propose est la création de points wifi gratuits à travers l’ensemble de la ville sur une période d’un an. Etant donné que ce sont des villes où nos fournisseurs de services sont absents, cela n’entravera nullement leurs activités économiques. Au contraire, des habitudes de consommation seront créées, de nouveaux services demandeurs de bande passante verront ainsi le jour, dotant ainsi ces villes d’une clientèle aujourd’hui inexistante pour les fournisseurs de service. Ces villes devront être aussi dotées d’un Centre Technologique offrant l’environnement nécessaire à ceux qui n’ont aucun équipement. Ces centres permettront de centraliser la disponibilité de l’énergie électrique en un seul lieu dans les villes où celle-ci est pratiquement absente.

Troisièmement, celui des marchés et de la création d’entreprises. L’utilisation du commerce en ligne peut aider à résoudre le problème de l’accès aux marchés. De véritables réseaux de support à la communauté peuvent être crées avec la Diaspora régionale. Les TIC peuvent faciliter un processus de jumelage éclairé et mutuellement profitable entre les villes sélectionnées, entre celles-ci et d’autres villes à l’étranger.

Quatrièmement, celui de l’organisation et de la formation. Aucun projet structuré ne peut réussir sans un processus participatif harmonisant l’action des divers acteurs et sans l’ajustement des compétences aux besoins des marchés. Chaque ville du projet devra être dotée d’au moins une salle de téléconférence permettant la conduite d’activités de télé éducation, ou de processus de communication avec des partenaires géographiquement séparés. Des volontaires seront invités à participer à des activités structurés leur permettant de transmettre gratuitement leurs compétences aux jeunes de ces villes. Un processus d’appel à collaboration sera engagé avec les operateurs du secteur.

Cinquièmement, celui de la résilience et de la maturation des infrastructures de télécommunications. Il est remarquable de constater que les operateurs ont pu remettre sur pied les équipements et sites détruits ou endommagés aussi rapidement. Mais le niveau de résilience doit être augmenté pour parer à des situations encore plus destructrices si l’on veut étendre la participation des TIC dans un processus de développement économique. Pour cela, le Conatel étudiera avec les acteurs concernés les voies et moyens de l’adoption de normes parasismiques et leurs mises en œuvre sur des périodes à étudier dans les installations existantes. La capacité de restauration sera augmentée en développant de nouveaux accès internationaux par fibre optique en dehors de Port-au-Prince.

Et sixièmement, celui de la mise en place des mécanismes de financement.

Déjà, plusieurs projets sont en train d’être montés par le Conatel de concert avec ses partenaires de l’UIT, de la FCC. La CITEL articule une stratégie d’assistance. Nos voisins dominicains ont promis leur appui. Dès le 19 mars, la première station de radio municipale et le premier point WIFi public seront inaugurés à Fort-Liberté.

La tragédie du 12 janvier sera transformée en opportunité. Les Haïtiens en ont la détermination et savent exactement ce qu’ils veulent pour leur pays. Il est certain que plus rien ne pourra se faire pour nous, du moins au Conatel et pour le secteur des Telecommunications, comme avant le 12 janvier. Nous devons à nos morts un pays prospère qui joue pleinement son rôle aux cotes des autres nations dans l’édification d’une société juste équitable, capable de préserver l’humanité des affres de tragédies telles que celles vécues par les Haïtiens ou les Chiliens. Je vous invite à nous aider à construire cette nouvelle Haïti en tant que partenaires.

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