Thursday, April 25, 2024
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Haïti: la croissance économique en berne à cause de l’instabilité politique

Port-au-Prince – Haïti n’a connu qu’un taux de croissance de 1,4% en 2016, selon les chiffres officiels communiqués mercredi, en raison de la crise électorale qui freine les investissements, et les perspectives pour l’année 2017 sont alarmantes dans le pays le plus pauvre de la Caraïbe. Nous avons un gouvernement qui n’est pas constitutionnel donc les acteurs privés locaux ou internationaux n’ont pas investi de manière considérable, explique l’économiste haïtien Kesner Pharel.

L’île compte deux pays et tous deux ont tenu des élections cette année mais la République dominicaine a tenu le scrutin en mai et nous, nous ne sommes toujours pas sortis de cette crise, analyse M. Pharel relevant que la République dominicaine a un taux de croissance de plus de 6%.

L’annulation du premier tour de la présidentielle fin 2015 a contraint Michel Martelly à quitter la présidence sans transmettre le pouvoir à un successeur élu.

Le parlement a élu en février un président provisoire pour un mandat de trois mois mais Jocelerme Privert est encore en poste car les résultats de la présidentielle, réorganisée le 20 novembre 2016, n’ont toujours pas été annoncés.

Cette instabilité politique a refroidi l’activité économique, aggravant encore le déficit budgétaire, la dévaluation de la monnaie nationale et donc l’inflation.

En début d’exercice, le gouvernement pensait entrer 77 milliards de gourdes (1,1 milliards de dollars) de recettes, ils n’ont pas collecté même 60 milliards alors que, selon le budget, les dépenses publiques s’élèvent à 122,6 milliards de gourdes: ce déficit a été comblé par la banque centrale, regrette Kesner Pharel.

Les conséquences de ce choix politique ont été lourdes: la monnaie nationale a perdu 25% de sa valeur et l’inflation a dépassé les 12% sur l’année 2016.

Ces chiffres sont ceux de l’année fiscale qui s’achève fin septembre 2016, donc on n’a pas pris en compte ce qui s’est passé avec Matthew, souligne par ailleurs l’économiste.

Début octobre, l’ouragan Matthew a ravagé la moitié sud d’Haïti causant près de 2 milliards de dollars de dégâts.

Les premières prévisions pour 2017 sont alarmantes car on parle de 1% de croissance, indique M. Pharel alors qu’un tel taux de croissance économique ne couvre pas la croissance démographique haïtienne, stable à 1,5%.

Vous allez retrouver un ensemble de jeunes terminant l’université et n’arrivant pas à trouver un emploi: ça peut encourager la délinquance, alerte l’économiste.

 

Dans le cas où les contestations des résultats des élections prennent fin, la perspective d’une stabilisation politique avec l’installation d’un nouveau président début février ne suffit même pas à rassurer les spécialistes.

Je ne pense pas qu’il y ait assez de compétences au niveau d’un parti politique ou au niveau d’un gouvernement pour résoudre tous ces problèmes. Il faudra faire appel aux acteurs de la société civile, il faudra avoir un parlement beaucoup plus efficace pour passer des lois mais la législature actuelle n’a pas encore montré de signe que ça sera le cas, considère M. Pharel.

Depuis leur prise de fonction en janvier 2016, les parlementaires haïtiens n’ont effectivement voté qu’une seule loi, refusant en revanche de voter le budget rectificatif qui aurait pourtant permis un ajustement des dépenses publiques en fonction des recettes.

Haïti, où plus de la moitié de la population a moins de 20 ans, reste le pays le plus pauvre de la Caraïbe: plus de 6 des 10,4 millions d’Haïtiens vivent sous le seuil de pauvreté avec moins de 2,42 dollars par jour, selon la dernière étude de la Banque mondiale.

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