Thursday, April 25, 2024
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Football/Rétro – Barthélemy, l’anti-star, enfin retrouvé

Enfin ce samedi 14 juillet, après 26 ans d’une discrétion qui s’apparente à du maquis, Claude Barthélemy ses vérités et ses déceptions poliment dites. Ce fut en 1986. Il revenait d’une expérience malheureuse de sélectionneur national de football, qui n’avait pas pu franchir les étapes Guatemala et Canada après le très facile exercice d’Antigua et Barbuda. Haïti est donc éliminée de la Coupe du monde de 1986. Aux grandes déceptions d’une pourtant prolifique carrière de joueur international, s’étaient ajoutés les quolibets du public et l’oubli des beaux jours d’une forte partie du monde du football. Les États-Unis allaient être sa terre d’exil sportif, social et politique.Blessures à cicatriser, lucidité à conserver, regard froid sur les hommes et les choses à cultiver. Reconnaissance d’un échec relatif dans la mission de changer l’image négative du footballeur haïtien.

Depuis 1986 donc, Bartho, l’ancien inter droit de l’ASC (1961-1964), promis à la profession médicale quand il cirait les bancs du Collège Notre-Dame au Cap-Haïtien, ailier droit au long cours du Racing, du Detroit Cougars (1967-1968) et de la Sélection Nationale (1965-1974), est installé dans le New-Jersey. Nazaire, Francillon et lui sont les seuls à ne plus remettre les pieds au pays depuis leurs décisions respectives de vivre à l’étranger. Toujours aussi râblé, les cheveux du crâne central disparus, « Coca », surnom dû à sa taille et l’épaisse musculature deses membres inférieurs, est un citoyen ordinaire du métro-boulot-dodo, loin des fastes des réceptions politico-sportives et des ivresses illusoires de la jeunesse sportive.

Le Racing ? Une belle carrière, une amitié sportive avec Roger Lafontant, simplement humaine, devenue politique par la force des regards de premier degré. Des succès qui cachaient une totale désorganisation. La Sélection Nationale ? Leader peu loquace auquel on se réfère volontiers quand tout a été dit et que la lumière insiste à ne pas se manifester. Des amitiés, disons connaissances sociales et politiques comme tous ceux qui, dans le brasier fusionnel de « noupral a Munich », de Francillon à Manno Sanon, portaient le rouge et noir pour le plaisir du jeu et la fierté nationale, le combat idéologique sur la couleur du drapeau, alors, mise en éclipse.

Haïti aujourd’hui ? Divorce ? Indifférence ? Vacances d’amour ? «Rien de tout cela, s’étonne l’intéressé, la mauvaise passion s’était emparée du pays, certaines personnes en sont arrivées à s’oublier et à banaliser la vérité et les besoins des hommes. Rien de constructif ne peut se réaliser dans un tel contexte. J’observe de loin et je m’accroche à mes principes».

Et le football proprement dit ? Il oublie presque, peut-être feint-il, son match extraordinaire contre le Racing de Buenos-Aires en 1973, 2-0, un but de lui et un autre de Manno Sanon. Depuis son émigration aux USA, Claude Barthélemy n’a plus jamais chaussé une chaussure de football, ni assisté à un match ni à une réunion d’anciens. Le football à la télé ? Très peu. Lors des grandes compétitions, quelquefois, la dernière Coupe d’Europe des Nations par exemple où il a apprécié la qualité exceptionnelle du football pratiqué par les Espagnols, contraire d’après lui à celui que lui imposait Tassy. Quoi donc ? « On comptait trop sur ma vitesse de course. C’était comme si je ne pouvais pas faire autre chose que courir », condamne Barthélemy.

L’homme apprécie évidemment sa large expérience de haut niveau, particulièrement sa participation à la Coupe du monde de 1974. Mais il insiste davantage sur les faiblesses de « son » équipe nationale que sur ses forces. « Au niveau tactique, exagère-t-il, nous étions nuls ».

C’est pourquoi Barthélemy recommande fortement qu’il y ait continuellement des colloques sur la tactique avec les entraîneurs haïtiens et qu’on apprenne aux jeunes beaucoup plus à jouer au football qu’à jouer au ballon.

Non, Claude Barthélemy n’a pas oublié Haïti. Tout juste, reconnaît-il, le temps passe, et personne n’est jamais la même. Lui est la même antistar qu’on a connue pendant 15 ans dans le football haïtien. Et il voudrait qu’on fasse mieux un jour que les soixante-quatorzards.

Patrice Dumont

 patricedumont21@hotmail.com

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