Source : MIAMI HERALD
MIAMI, FLORIDE – L’influent homme d’affaires haïtien Pierre Réginald Boulos a été arrêté jeudi dernier à son domicile de Palm Beach par les agents de l’Immigration and Customs Enforcement (ICE), selon les informations obtenues par le Miami Herald. Il est actuellement détenu en Floride pour des violations présumées de la législation sur l’immigration.
Toujours selon le Miami Herald, cette arrestation marque un tournant, car Boulos devient ainsi la personnalité haïtienne la plus en vue interpellée par l’administration Trump dans le cadre de sa politique de durcissement à l’égard des immigrés, notamment ceux bénéficiant du statut de protection temporaire (TPS).
Âgé de 69 ans, Boulos, né à New York, est à la fois médecin et entrepreneur. Il est connu pour son implication dans la vie politique haïtienne et pour ses relations avec des responsables américains de haut niveau. Toutefois, il avait renoncé à sa citoyenneté américaine lorsqu’il s’était porté candidat à l’élection présidentielle en Haïti, condition exigée par la Constitution haïtienne.
Selon le Miami Herald, la situation migratoire de Boulos est rendue complexe par sa renonciation à la citoyenneté américaine. Des sources proches de l’enquête indiquent qu’il aurait été transféré du centre de détention de Krome (Krome North Service Processing Center) vers un centre fédéral de détention à Homestead, en Floride.
Le nom de Boulos n’apparaît pas encore dans le système de localisation des détenus de l’ICE en raison d’un retard de traitement, mais selon le Miami Herald, les registres du tribunal d’immigration indiquent qu’il doit comparaître le 31 juillet à 8 h devant le juge Jorge Pereira à Krome. L’audience est classée comme une affaire « en cours ».
Toujours selon le Miami Herald, les documents judiciaires ne précisent pas si les violations de Boulos sont de nature pénale. Toutefois, plusieurs sources rapportent qu’il aurait omis de mentionner dans une demande d’immigration son implication dans une organisation politique en Haïti, ce qui constituerait une violation des règles du Service de l’immigration.
Une arrestation au contexte politique tendu
Le cas de Boulos survient dans un contexte d’incertitude croissante pour des dizaines de milliers d’Haïtiens vivant aux États-Unis. D’après le Miami Herald, l’administration Trump a annoncé le rétablissement de la date butoir du 3 février pour les bénéficiaires du TPS, tout en maintenant sa volonté d’y mettre un terme par la suite.
Toujours selon le Miami Herald, le secrétaire d’État Marco Rubio a publié un communiqué évoquant des « actions à l’encontre d’individus dont les activités pourraient avoir des conséquences sérieuses sur la politique étrangère des États-Unis », sans toutefois citer Boulos nommément. Rubio affirme que certains résidents permanents légaux aux États-Unis ont soutenu des chefs de gangs haïtiens liés au groupe Viv Ansanm, désigné comme organisation terroriste étrangère par le Département d’État américain en mai dernier.
« Les États-Unis n’autoriseront pas les individus à profiter des avantages d’un statut légal tout en facilitant les actions de groupes violents ou criminels », a déclaré Rubio, selon le Miami Herald.
Une figure controversée en Haïti
Selon le Miami Herald, Pierre Réginald Boulos est une personnalité hautement controversée en Haïti. Il a longtemps exercé en tant que médecin et homme d’affaires tout en intervenant de manière active dans les coulisses du pouvoir politique. Il est le fondateur du Groupe Boulos, qui regroupe plusieurs entreprises, notamment les supermarchés Delimart, la concession automobile Autoplaza (distributeur de Nissan), ainsi que des sociétés de vente d’équipements de construction, de bus et de camions.
Toujours selon le Miami Herald, il a aussi été impliqué dans la restructuration du journal Le Matin et dans le rachat de l’hôtel El Rancho à Pétion-Ville, qu’il a rouvert en 2013 sous la bannière NH Hotels.
Boulos a souvent été la cible de critiques virulentes, d’allégations de corruption et de théories du complot sur les réseaux sociaux. Son influence politique s’est illustrée dans les années 2000 lorsqu’il s’est activement opposé à l’ancien président Jean-Bertrand Aristide. En 2003, après l’enlèvement de son épouse, il avait relocalisé sa famille à Miami.
Ambitions présidentielles et lobbying aux États-Unis
Toujours d’après le Miami Herald, Boulos avait relancé ses ambitions politiques en 2021, en se présentant comme candidat à la présidence en Haïti. Il avait alors renoncé à sa citoyenneté américaine pour respecter les critères d’éligibilité. Un cabinet de lobbying américain, basé à Denver, avait été engagé pour 10 000 dollars par mois afin de promouvoir sa candidature. Ce cabinet décrivait Boulos comme « un médecin respecté, homme d’affaires prospère et fondateur du parti politique MTV Ayiti ».
Le Miami Herald souligne que ces efforts de communication avaient pour objectif d’établir des liens solides avec des élus américains et la diaspora haïtienne, dans un contexte où le président Jovenel Moïse faisait face à de multiples accusations d’autoritarisme, avant son assassinat en juillet 2021.
Une arrestation qui secoue les élites haïtiennes
Selon le Miami Herald, l’arrestation de Boulos a semé l’émoi parmi les élites haïtiennes. En raison de sa stature et de son réseau d’influence — notamment ses relations avec des responsables américains et onusiens, ainsi que ses contrats publics en Haïti — cette mesure répressive est perçue comme un signal fort de l’administration Trump.
Des sources proches de la famille affirment que les autorités américaines reprochent à Boulos de ne pas avoir déclaré l’ensemble de ses activités politiques lors de ses démarches d’immigration, en particulier lorsqu’il avait sollicité un changement de statut à travers le TPS, puis la résidence permanente via l’un de ses enfants.
Une politique migratoire de plus en plus dure
Selon le Miami Herald, cette arrestation s’inscrit dans un contexte plus large de durcissement des politiques migratoires. L’administration Trump a renforcé les contrôles aux frontières et dans les aéroports. Plusieurs voyageurs haïtiens arrivant à l’aéroport international de Miami ont été interrogés, leur téléphone confisqué, et leur autorisation de séjour réduite. Un homme d’affaires haïtien en transit depuis la République dominicaine a même été refoulé, selon le Miami Herald.
Le gouvernement américain a récemment modifié sa position en affirmant que les conditions en Haïti se sont améliorées, justifiant ainsi la fin prochaine des protections offertes par le TPS. Cette affirmation contraste fortement avec les rapports des Nations unies et d’autres organisations, qui évoquent une détérioration continue de la situation sécuritaire, marquée par la prolifération des gangs, l’insécurité alimentaire et les déplacements de populations.