Port-au-Prince – INFOHAITI.NET – Fritz Alphonse Jean a prononcé AUJOURD’HUI son premier discours en tant que président du Conseil présidentiel de transition (CPT) en Haïti. Cette allocution, marquant une passation de pouvoir au sein de l’instance dirigeante de la transition, a été axée sur « la sécurité, la gouvernance, le redressement économique et l’organisation d’élections crédibles ». Il est le troisième membre du CPT à occuper cette fonction après Edgard Leblanc et Leslie Voltaire.
Une transition symbolique et lourde de responsabilités
Dès l’entame de son discours, Fritz Alphonse Jean a souligné le caractère symbolique de cette passation, témoignant de l’engagement du CPT en faveur de l’alternance et de la continuité institutionnelle. Il a rendu hommage à ses prédécesseurs, saluant les efforts déployés dans un contexte marqué par l’instabilité et l’urgence.
Le nouveau président du CPT a rappelé que la situation du pays exige des actions concrètes et rapides, notamment pour les populations de l’Ouest et de l’Artibonite, gravement affectées par la violence. Il a ainsi mis en exergue le rôle essentiel de l’État dans la protection des citoyens et le rétablissement de l’ordre public.
Un constat alarmant : l’Insécurité au cœur des préoccupations
L’allocution de Fritz Alphonse Jean a dressé un portrait sombre mais réaliste de la situation sécuritaire du pays. Il a dénoncé le rôle des trafiquants de drogue, d’armes et de personnes, ainsi que l’implication de certains entrepreneurs politiques et éléments du secteur des affaires dans la perpétuation de l’insécurité. Il a insisté sur la pression exercée par cette violence sur les ressources publiques, limitant les investissements dans les secteurs clés comme la santé, l’éducation et l’épanouissement de la jeunesse.
Pour répondre à cette crise, Fritz Alphonse Jean a annoncé « l’adoption d’un budget rectificatif de guerre, visant à orienter les dépenses vers la lutte contre l’insécurité ». Il a souligné l’urgence de former plus de 3 000 recrues pour renforcer la Police nationale d’Haïti et les forces armées. De plus, il a mis l’accent sur la nécessité de réorganiser et de renforcer les services de renseignement.
Une gouvernance transparente et responsable, promet Fritz Jean
La question de la gouvernance a occupé une place centrale dans le discours du nouveau président du CPT. Il a mis en avant la nécessité d’une administration publique efficace et transparente, insistant sur la mise en place d’un système d’information ouvert au public pour suivre les actions des institutions de l’administration publique.. L’importance du soutien aux institutions de surveillance telles que l’ULCC (Unité de Lutte contre la Corruption), la CSCCA (Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif) et le CNMP (Commission Nationale des Marchés Publics) a également été soulignée.
Fritz Alphonse Jean a par ailleurs annoncé la création d’un centre d’appel (nouveaux numéros d’alerte) permettant aux citoyens de signaler toute forme d’abus ou de corruption dans les services de l’État, notamment à la Direction Générale des Impôts, à l’Immigration et à la Douane.
Une relance économique basée sur la production nationale, souhaite le nouveau président du CPT
Sur le plan économique, le successeur de Leslie Voltaire a préconisé une approche centrée sur le soutien à la production nationale’ la consommation et la stimulation de l’investissement. Il a souligné l’impératif de mobiliser les ressources domestiques pour amorcer une croissance soutenue et freiner la tendance à la récession économique des six dernières années.
« La relance passe également par des mesures humanitaires urgentes, telles que le relogement des personnes déplacées internes, le soutien aux populations victimes de l’insécurité et la mise en place de structures d’accueil pour les déportés » a-t-il rappelé.

La priorité : Le retour à l’ordre constitutionnel
Fritz Alphonse Jean a affirmé avec force l’engagement du CPT à organiser des élections libres et transparentes afin de garantir le retour à l’ordre constitutionnel le 7 Février 2026. Il a insisté sur la nécessité de financer le fonds électoral et de poursuivre les travaux du Comité de pilotage de la Conférence nationale. L’identification des citoyens et la concertation avec la diaspora figurent parmi les axes prioritaires pour garantir l’inclusivité de ce processus, souhaite Fritz Jean
Enfin, il a appelé à la solidarité de la communauté internationale pour soutenir le processus électoral et la stabilisation du pays.
Gouvernance politique en Haïti après l’assassinat de Jovenel Moïse (7 juillet 2021 – aujourd’hui)
Le brutal assassinat du président Jovenel Moïse dans sa résidence privée le 7 juillet 2021 a plongé Haïti dans une crise politique et sécuritaire majeure. Depuis lors, plusieurs figures et structures ont exercé le pouvoir, souvent dans un climat d’instabilité marqué par l’absence de président élu, une insécurité croissante et une pression internationale.
- Claude Joseph : Une transition express (7 – 20 juillet 2021)
Claude Joseph, ministre des Affaires étrangères et Premier ministre par intérim au moment de l’assassinat, a pris temporairement la direction du pays.
Il a décrété l’état de siège pour tenter de maintenir l’ordre.
Sous la pression de la communauté internationale et notamment des États-Unis, il a dû céder le pouvoir.
- Ariel Henry : Un Premier ministre sans président (20 juillet 2021 – 25 avril 2024)
Ariel Henry, un neurochirurgien, avait été désigné Premier ministre par Jovenel Moïse deux jours avant son assassinat, mais n’avait pas encore été investi.
Avec le soutien des États-Unis et de la communauté internationale, il est officiellement installé le 20 juillet 2021. Son gouvernement a fonctionné sans président ni parlement, car le mandat des députés et sénateurs avait expiré en janvier 2020.
Son mandat a été marqué par :
- Une aggravation de l’insécurité : La violence des gangs a explosé, contrôlant une grande partie de Port-au-Prince.
- Une crise humanitaire et économique : Hausse des prix, rareté des carburants, famine en augmentation.
- Des contestations politiques : Plusieurs groupes, dont ceux du secteur Montana, ont contesté sa légitimité.
L’appel à une intervention internationale : En octobre 2022, Ariel Henry a demandé l’envoi d’une force internationale pour lutter contre l’insécurité.
En mars 2024, sous la pression des États-Unis, de la CARICOM et des acteurs politiques haïtiens, Ariel Henry (alors en visite à l’étranger) a annoncé sa démission, mais il est resté en poste jusqu’à la mise en place d’un organe de transition.
- Le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) : Une nouvelle ère de gouvernance (à partir du 25 avril 2024)
Face à l’impasse politique et à l’absence d’élections depuis 2016, un Conseil Présidentiel de Transition (CPT) a été formé sous la supervision de la CARICOM.
Composition : 9 membres, représentant divers secteurs politiques et sociaux haïtiens.
Mission :
- Restaurer la sécurité et lutter contre les gangs.
- Organiser des élections générales pour rétablir un gouvernement démocratiquement élu.
- Réformer les institutions haïtiennes.
Frtiz Alphonse Jean est le troisième membre du CPT à occuper la présidence après Edgard Leblanc et Leslie Voltaire.
QUI EST FRITZ ALPHONSE JEAN ?
(Sources combinées)
Fritz Alphonse Jean, né le 22 avril 1956 au Cap-Haïtien, est un économiste et écrivain. Il a effectué ses études aux États-Unis, obtenant un B.S. en mathématiques et en économie de l’Université Fordham en 1981, ainsi qu’une maîtrise en économie, spécialisée en commerce international, de la Long Island University en 1983. Il a également entrepris des études doctorales à la New School for Social Research de New York, se spécialisant en monnaie, banque et commerce international, avec une thèse intitulée « Interest rate Formation in Backward Agriculture ».
De retour en Haïti, Fritz Jean a débuté sa carrière comme professeur à l’Université d’État d’Haïti et consultant en économie. En 1996, il a été nommé vice-gouverneur de la Banque de la République d’Haïti (BRH), avant d’en devenir le gouverneur de 1998 à 2001. Par la suite, il a été doyen de la Faculté des sciences sociales, économiques et politiques de l’Université Notre-Dame d’Haïti de 2005 à 2009. Il a également présidé la Chambre de commerce et d’industrie du Nord-Est et a été l’un des membres fondateurs de la Bourse de valeurs haïtienne.
Fritz Jean est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont « Haïti – la fin d’une histoire économique » publié en 2013, qui offre une analyse économique et historique du pays, et « Améthys – Plaies Ouvertes », un roman en français relatant les aventures d’un jeune garçon vivant au Cap-Haïtien.