Thursday, April 25, 2024
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Aigle Noir et Violette comme dans une chorégraphie

Ces  équipes ont produit une beauté de match de football, pourtant sans but, au Stade Sylvio Cator.
Les danseurs s’expriment selon une chorégraphie que seuls peuvent contrarier leurs préparation et état de forme. Car, ils n’ont point à se soucier de la teigne d’un adversaire au contraire des sports d’opposition directe. Si le talent est pur, le spectacle est là qui nous ravit.

Ces  équipes ont produit une beauté de match de football, pourtant sans but, au Stade Sylvio Cator.
Les danseurs s’expriment selon une chorégraphie que seuls peuvent contrarier leurs préparati

Le ravissement, dimanche après-midi, a empli  les un peu plus de 1500 mordus devenus privilégiés grâce à la haute qualité du jeu offert par Aigle Noiristes et Violettistes, match clos pourtant sur un 0-0 forcément trompeur pour ceux-là qui ne s’y étaient pas conviés. Quoi donc, en ces temps de sécheresse esthétique généralisée, 22 jeunes hommes se seraient surpassés jusqu’à élever le football -plus étonnant : le football haïtien- au niveau d’un art majeur !

On eût cru à une chorégraphie super audacieuse où les artistes vêtus de vert et noir les uns, de bleu et blanc les autres, s’entrelaçaient souvent, se mêlaient parfois, s’entrechoquaient même quelquefois, mais toujours dans une posture qui ne laissa point le temps aux récriminations, mais toujours dans l’idéal du jeu, d’un ballon aux parcours divers, orientés par des pieds adroits, eux-mêmes commandés par  des cerveaux bien disposés relayés par des nerfs solides qui quelquefois, comme pour ne pas déifier les acteurs, flanchaient au bout des combinaisons pour un solde de 0-0 plein d’allégresse.

Huit minutes ne s’étaient écoulées que le jeune Horat faisait vibrer la transversale du Violette par une frappe intelligente, ce à quoi Alexandre Boucicaut répondit dans les mêmes proportions sur un coup franc à la 31e minute. Le ballon s’enivre du frottement avec le gazon artificiel mousseux de Sylvio Cator par l’effet des passes dosées, exercice dans lequel s’illustre tout le monde, avec notion spéciale pour Horat, Johny Joseph, Ovilmar Hérode, Wedson Anselme, André Desrosiers, Chilove Compère du côté de l’Aigle ; Jeff Narcisse, Carl Edwin Vallon, Alexandre Boucicaut, Wilberne Augusma, Bertrand Séide du côté du Violette.

Les passes de décalage pleuvent. Les débordements suivent, les centres courts et les centres longs précèdent des coups de tête, comme celui d’Anselme (Aigle Noir, 20e)ou Elistin (Violette, 27e) qu’on voit se mouiller dans les filets, mais les gardiens veillent. Wilberne Augusma (Violette) plane un peu plus haut que Desrosiers (Aigle Noir). Du coup le Violette augmente son taux de dangerosité.  Bertrand Séide slalome : 1, 2, 3 défenseurs et…but ? Non, Wildo Bernabé détourne (53e). Jeff Narcisse met à profit une passe perforante d’Augusma dans le dos de Delsa: fonce, conduit bien son ballon, perd ses appuis au moment de la frappe. À sa suite, Vallon se retrouve au bout d’une série de passes à une touche ; lui aussi apprend à ses dépens que Bernabé n’a pas l’intention de flancher (59e). Boucicaut se rappelle avoir marqué un fort joli but d’une frappe longue bien ajustée de l’intérieur du pied droit contre le Honduras à Tegucigalpa en 2009; Il tente le même geste à moins longue distance : le ballon, têtu, frôle le poteau gauche de l’Aigle (63e). Le public se contorsionne de plaisir et d’étonnement, croyant à peine ses yeux.

L’orgie de beautés n’arrête pas. Diego Andréis sera assez lucide, tonique et courageux pour, d’un tacle glissé, détourner un ballon de Bertrand Séide qui se dirigeait pépère vers le filet de l’Aigle (70e). L’Aigle semble battre de l’aile. Chilove Compère et Desrosiers combinent alors admirablement à gauche, mais la frappe d’Anselme trouve les mains sûres de Philogène « Campos » (76e). Wolf Edson Joseph, petit frère de Guimpsly Joseph l’ancien international des 17 ans qui avait marqué un très beau but contre le Japon à Séoul, entré à la place d’Elistin, ne peut exploiter un ballon raté par le gardien Bernabé (84e). Et c’est Boucicaut qui, à la 88e minute, esquisse le dernier pas de la chorégraphie sur un air de symphonie inachevée : à la sortie d’un corner court, il dribble Andréis puis Hérode, fait face à Bernabé et tire du gauche dans les airs. Et l’arbitre se met au diapason. Peut-être aurait-il pu siffler penalty pour un tirage de maillot furtif et malin commis par Paulin. Pas de réclamation. Globalement du très bon arbitrage. Et les joueurs aident le juge dans sa tâche. Du football, rien que du football, et d’un standard maintenu jusqu’à la 90e minute.

Aux acteurs de la soirée et à leurs entraîneurs Beauvais et Thomas, malgré la pestilence des toilettes les spectateurs, à la sortie du stade, en signe de reconnaissance, ont offert une gerbe d’orchidées super géantes par leurs larges sourires et leurs commentaires enflammés. Le football au Stade Sylvio Cator ne mourra jamais.

Patrice Dumont

patricedumont21@hotmail.com

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