Sunday, May 5, 2024
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Introduire les débats dans l’apprentissage scolaire en Haïti: Yves Cajuste vient de donner le ton.

Présidentielles haïtiennes 2015: les vrais enjeux, tel est le titre du dernier film réalisé par Yves Cajuste, dont la grande première a eu lieu lieu le dimanche 18 Octobre dernier au Lycée de Milton, non loin de Boston. La projection du  film a été suivie d’une causerie de Jean Monard Metellus de Ranmase (Radio Caraïbes) sur le processus électoral en Haïti.

Produit par Multicultural Television Network (MCT), ce film met en vedette des acteurs atypiques comme Chérubin Dorcil, ancien présentateur à la Télévision Nationale d’Haïti et présentement présentateur à la Voix de l’Amérique, dans le rôle de Jacques Bienfait, journaliste ; Rulx Denis, ancien Directeur dela Programmation à Radio Nationale, dans le rôle de Marc Cintelli,  candidat du Parti de Consensus pour un Renouveau National (CRN) et Nadège Denis Gilles dans le rôle de Eloïse RoseMire de LaRochelle, candidate du Parti Rassemblement Solidaire pour le Changement (RSC).

Le film fait un état des lieux du paysage politique haïtien. S’il est vrai que les candidats tentent de peindre un  portrait réaliste de la mentalité de nos leaders qui promettent le ciel sans avoir les moyens d’y arriver, il est tout aussi important de souligner que les agissements des candidats qui participaient aux débats présidentiels, modérés par le journaliste Jacques Bienfait, ne cadrent pas avec la réalité de chez nous. Les personnages du film sont loin des pratiques antidémocratiques affichées souvent par nos hommes et femmes d’Etat. On a l’impression d’assister plutôt à un exercice démocratique dans les pays à tradition démocratique.

Le film a été réalisé sur le vif avec des évènements quasi réels et des dates qui rappellent curieusement les élections programmées pour ce dimanche 25 Octobre. Les débats mettent face à face deux candidats aux idéologies politiques diamétralement opposées. Marc Cintelli représente, sans le nommer, les dépouilles du régime duvaliériste, mais avec un cachet de modernité. Son projet de société est clair : il prône un Etat fort et promet de rétablir la peine de mort, seul moyen, selon lui, de se défaire de la criminalité rampante qui entrave le développement du pays. Pour sa part, la candidate du Parti Rassemblement Solidaire pour le Changement (RSC), transfuge d’un régime progressiste mais dépourvue de programme précis, se contente d’accuser son adversaire d’être de connivence avec le gouvernement en place et partisan des coups d’état. Son discours est plein d’émotion  et rappelle une certaine rhétorique qui semble avoir fait de bonnes recettes depuis la libération de la parole  en Haïti, mais qui jusqu’ici n’a pas pu délivrer le changement promis.  Tout compte fait, à travers les échanges parfois incisifs et les prises de position sur différentes thématiques (éducation, justice, corruption, agriculture, relations haïtiano-dominicaines, intégration de la diaspora), le public qui avait fait le déplacement à Milton High School Dimanche dernier pouvait facilement identifier le courant politique de la candidate du RSC et celui du CRN.

Pendant les deux heures de débat entre les candidats, on on avait l’impression par moments d’assister à un évènement réel si les acteurs n’avaient pas, de temps en temps, laissé l’étoffe des personnages qu’ils incarnent pour se retrouver dans leur réalité quotidienne. Rulx Denis nous raffole avec sa diction impeccable et son langage châtié. Il nous rappelle Marc Bazin, leader politique au savoir immense  Il en est de même pour Nadège Denis Gilles, femme d’une grande culture et qui semble incarner des femmes politiques de la trempe de Suzie Castor, de Ertha Pascal Trouillot ou de Mirlande Manigat. Seul Chérubin Dorcil est dans sa peau, dans son rôle de Jacques Bienfait, un excellent modérateur qui a tout fait pour maintenir l’équilibre entre les protagonistes.

Le film  «Les présidentielles haïtiennes 2015 : les vrais enjeux » produit par MCTV , est loin d’être  une fleur qui fanera après le passage du printemps. Il a un caractère didactique et peut servir d’instrument éducatif à nos futurs leaders. Dans des pays à vocation démocratique, les débats sont enseignés dans les écoles pour infuser l’esprit de compétition et l’acceptation des idées contraires dans la formation des jeunes. Ceci étant dit, ce film doit poursuivre son petit bonhomme de chemin à travers nos lycées et nos écoles privées. La formation de nos élites intellectuelles doit commencer à la base, c’est à dire, sur les bancs de l’école. Cette approche aura pour conséquence la mise au rencart de l’improvisation. Il n’est un secret pour personne que parmi les 54 candidats à la présidence, nombreux sont ceux qui n’ont jamais participé (dans leur vie) à une interview pour obtenir un emploi, voire à un débat au cours duquel ils doivent faire face à des adversaires et au public.

A l’heure de la technologie, nos dirigeants doivent innover. Un tel film peut être produit en modules et inséré dans les curricula. Les ressources matérielles et humaines sont là, pourquoi ne pas les utiliser ?

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