Friday, April 26, 2024
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“Haïti J’accuse” : Frantz Jean-Baptiste rompt le silence pour ne pas «être complice»

Tous ceux qui, dans l’Etat du Massachusetts, ont eu l’occasion de rencontrer cet intellectuel peu loquace, au regard soutenu et pensif, à l’allure à la fois rassurante et prudente, savaient qu’il allait, un jour, nous livrer tôt ou tard dans un ouvrage,  ses années de réflexions et de recherche sur Haïti, ses frustrations face à la gestion «malsaine »  de ce pays qu’il a laissé malgré lui, à l’âge de 25 ans, pour s’exiler en France dans les années 80 avant de tenter l’expérience nord-américaine au début de ce siècle.

En effet, hier dimanche, environ 300 compatriotes ont bravé le froid (7-10 degrés C) pour assister au luxueux Club Lantana à la vente-signature de «Haïti J’accuse», le premier ouvrage de Frantz Jean-Baptiste, paru aux éditions EDUCA VISION. Un récit, un roman, un essai. Ni l’un, ni l’autre. Un roman d’essai, nous a dit l’auteur, un juriste diplômé en science politique et en Mutations des Sociétés  et Cultures en Europe au moment de présenter son premier ouvrage. Quand on veut à la fois « défendre sa foi chrétienne et son identité et proposer des alternatives innovantes », s’impose donc un genre littéraire hybride qui se situe  entre le roman et l’essai. Tout en s’offrant plus d’espace en choisissant ce genre littéraire, l’auteur semble vouloir prendre une certaine distance, malgré tout, par rapport à la fiction. Le fonctionnement ou le dysfonctionnement de la société haïtienne décrit par le personnage principal de ce roman d’essai, Eustache Lindenberg, ne relève pas de la fiction, a rassuré Frantz Jean-Baptiste.

Aucun dirigeant-visionnaire depuis 1804
Cinq petits mots pour expliquer notre cuisant échec après plus de deux siècles d’indépendance, a martelé Frantz Jean-Baptiste en guise d’introduction à une conférence-débats sur «les problématiques haïtiennes » – conférence prononcée en marge de la vente-signature de son ouvrage “Haïti J’accuse” .
«Haïti est un grand pays qui traine. L’influence d’Haïti sur le monde au début du 19ème siècle a été remarquable. Ne pas le reconnaitre c’est réfuter l’histoire ». Cette brève référence de notre glorieuse histoire devait laisser la place à une analyse profonde et critique de la société haïtienne dans ses différentes composantes tant de l’intérieur que de l’extérieur.
«Nous ne sommes pas le seul Pays Moins Avancé (PMA) des Amériques par accident. C’est tout simplement le résultat de la mauvaise gestion de la chose publique par nos dirigeants »  s’est plaint  Frantz Jean-Baptiste qui en profita pour mettre en exergue les progrès réalisés en moins d’un demi-siècle par la république voisine, «un pays que nous avons occupé pendant plus de 20 ans ».
«Le PIB de nos voisins était estimé à 50 milliards de dollars alors que le nôtre avoisinait à peine 7 milliards pour la même période ». Des statistiques qui mettent à nue l’état de notre sous-développement. «La réelle différence entre nos deux pays est que de l’autre côté de la frontière, il y a une conscience nationale chez les élites dirigeantes mais chez nous cultivons une culture individualiste et personnelle »  a rappelé Frantz Jean-Baptiste qui espère déclencher un déclic chez tous ceux qui veulent changer la donne.

Au premier plan, Frantz Jean-Baptiste et les membres de sa familleNotre régime politique : un handicap majeur
«Nous copions malheureusement tout ce qui est mauvais de la France » a fait remarquer Frantz Jean-Baptiste qui a vécu et étudié dans pendant 17 ans l’Hexagone. Analysant la Constitution de 1987, le juriste a relevé pas mal d’anomalies et pas des moindres. Le régime semi-parlementaire, semi-présidentiel n’est pas fait pour un pays qui n’a connu que la tyrannie et la dictature dans son histoire. Faisant référence à la cohabitation politique qu’a connue la France à trois reprises (Mitterand-Chirac entre 1986 et 1988, Mitterand-Balladur entre 1993 et 1995 et la plus «brutale » et la plus longue entre Jacques Chirac et Lyonel Jospin. Cette dernière avait duré 5 ans.
«Allez demander aux hommes politiques français s’ils aiment ce système »  s’est questionné Frantz Jean-Baptiste qui a vécu la première cohabitation entre le leader de la «marée rose de 1981 » et l’ancien maire de Paris, l’un des plus importants leaders de la droite  sous la Vème république.

«Haïti a besoin d’un régime présidentiel » recommande ce juriste de 54 ans qui plaide en faveur d’une nouvelle constitution en évoquant les récentes et longues tractations entre la présidence  de Martelly et le parlement Joasil/Yacinthe  pour choisir un premier ministre et monter un gouvernement. «La Charte de 1987 avec ses 298 articles et ses nombreuses  incohérences n’est pas applicable, 24 ans après le référendum »  a rappelé Frantz Jean-Baptiste qui qualifie de piteux le travail de nos parlementaires.  Pour rendre productive l’action législative, il faudrait «qu’un prétendant au poste de législateur ait au moins un diplôme universitaire »  a déclaré l’auteur de «Haïti J’accuse » répondant à une question sur l’équilibre entre les pouvoirs exécutif et législatif.

L'écrivain et son épouse Gina Chanlatte Jean-BaptisteCommunauté et aide internationales : de la pure fiction ?
La catastrophe du 12 janvier 2010 a mis en évidence non seulement nos faiblesses institutionnelles mais également les limites de l’aide internationale. Entre 8 et 10 milliards de dollars ont été promis quelques semaines après le séisme lors de cette fameuse conférence des Nations-Unies à New-York, a rappelé le spécialiste en relations internationales. « Deux ans après, les promesses n’ont pas été honorées, les victimes vivent encore sous les tentes dans les conditions que tout le monde sait ».

Lors de cette conférence sur «les problématiques haïtiennes », Frantz Jean-Baptiste s’est également prononcé sur le phénomène du kidnapping en Haïti. «Le kidnapping n’existait pas chez nous avant l’arrivée des soldats de la Mission des Nations-Unies pour la Stabilisation d’Haïti (MINUSTAH), n’est-ce pas ?  Haïti est-il plus stable depuis le débarquement des forces onusiennes sur le territoire national, se demande  le conférencier sans trouver de réponse à cette double interrogation.

Concernant l’aide internationale promise et/ou accordée à Haïti, le conférencier ne cache pas du tout son pessimisme. «L’aide internationale est une idée conçue par les Nations-Unies qui tarde encore à donner des résultats tangibles » s’est emporté un Frantz Jean-Baptiste quelque peu défiant et prêt à participer à ce débat contradictoire, vieux comme l’institution internationale logée au «Palais de verre » de Manhattan à New-York.

En moins d’une heure, l’auteur de «Haïti J’accuse » dans un style très simple nous a conduit, lors de cette conférence,  sur tous les terrains marécageux du sous-développement d’Haïti, de tout ce qui fait de notre pays non pas ce qu’il est, en fait dans la réalité,  mais plutôt ce qu’il est devenu aujourd’hui. Comment s’en sortir ? Faute de temps, peut-être, des pistes de solutions n’ont pas été proposées. Il est espérer que Frantz, à travers le principal personnage de ce roman d’essai, nous aide à trouver des voies propres qui nous conduiront enfin vers des solutions en vue d’un mieux-être pour nos populations.
Le public qui a fait le déplacement hier soir au Lantana  est sorti satisfait de cette activité à la fois socio-culturelle et politique. L’auteur a eu le mérite de parler des causes de nos grands défis sans personnaliser le débat. Quand des haïtiens se réunissent pendant plus de deux heures sans ces débats stériles sur Duvalier, Aristide, Préval et depuis quelques mois Martelly, c’est bon signe.

Un extrait de la conférence de l’écrivain Frantz Jean-Baptiste.

 

L'auteur Frantz Jean-Baptiste Photo-souvenir après la vente-signaturePhoto-souvenir après la vente-signatureJerry Jean-Baptiste

 

L’auteur  (extrait de l’ouvrage)

L’auteur de «Haïti J’accuse », Frantz Jean-Baptiste, est né à Port-au-Prince, de Dominique Jean-Baptiste et d’Emilienne Assé. Il s’est marié avec Gina Chanlatte. Aujourd’hui père de cinq (5) enfants, laure-Ginie, Jerry, Théo, Angeline et Mathew, il est auteur dramatique de nombreuses pièces de théâtre, juriste, diplômé en science politique, en Mutations des Sociétés et Cultures en Europe, et directeur –fondateur de la revue Diafrorama publiée à Paris. Vivant aux Etats-Unis, il poursuit ses travaux de recherche et trvaille pour la radio Echo-Evangélique.
Extrait de «Haïti J’accuse »

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