Tuesday, April 30, 2024
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Thomassique, la ville qui vous accueille

Le 28 Janvier c’est la fête de St Thomas d’Aquin. C’est le jour où les professeurs de philosophie et les élèves des classes terminales se donnent à cœur joie à des questions existentielles en vue d’une meilleure compréhension des problèmes de la vie et des phénomènes naturels  C’est la fête des philosophes. C’est aussi le 28 janvier, la fête de Thomassique, la ville frontalière et commerciale  par excellence du haut plateau central.

Le 28 Janvier c’est la fête de St Thomas d’Aquin. C’est le jour où les professeurs de philosophie et les élèves des classes terminales se donnent à cœur joie à des questions existentielles en vue d’une meilleure compréhension des problèmes de la vie et des phénomènes naturels  C’est la fête des philosophes. C’est aussi le 28 janvier, la fête de Thomassique, la ville frontalière et commerciale  par excellence du haut plateau central.

Lorsque je grandissais à Thomassique dans les années 80, la fête, sous le leadership du révérend Père Marc Fivez, tombait le 7 mars. Après le retrait du curé belge «haïtien», les Thomassiquois vont s’habituer à une nouvelle date pour la fête patronale qui continue toujours d’attirer la grande foule. Un ancien prêtre catholique Thomassiquois explique que le transfert du 7 mars au 28 janvier est très significatif, car il vaut mieux de célébrer la vie que la mort.  Le 7 mars c’est la commémoration de la mort de Saint Thomas d’Aquin alors que le 28 janvier c’est la date de sa naissance, affirme t-il. Aujourd’hui je me propose d’inviter les lecteurs et les internautes à faire la route  avec moi et nous allons nous atterrir à Thomassique: ma ville natale,  la ville qui nous accueille.

La commune de Thomassique fait partie de l’Arrondissement de Cerca-la-source du département du Centre.  En dépit de cet rattachement, la commune de Thomassique est plus dense et plus dynamique que la commune de Cerca-la Source. La population actuelle de la commune de Thomassique peut être estimée à près de 70.000 habitants. A l’instar des autres villes du plateau central, Thomassique n’a pas de bornes maritimes. Elle est bornée à l’est, au sud et au nord-est par la République Dominicaine, à l’ouest par la ville de Hinche, au nord par la commune de Cerca-La-Source, et au sud-ouest par la commune de Thomonde.  Ses coordonnées géographiques sont 19°5’0″ latitude nord et 71°50’0″ longitude ouest.  Etablie sur une altitude moyenne de 450 mètres, elle couvre une superficie de 265 Km2.  Sa situation climatique est caractérisée par deux saisons: une saison sèche de novembre à avril et une saison pluvieuse de mai à novembre.

La vie économique de Thomassique repose foncièrement sur l’agriculture, l’élevage, l’artisanat et les corps de métiers tels que la maçonnerie, l’ébénisterie, la charpenterie et la couture etc…  De par sa position stratégique, le commerce y joue une place prépondérante. Le charbon de bois est actuellement la filière extra agricole la plus rentable du circuit commercial de la commune. L’exploitation à outrance du charbon constitue une entrave très sérieuse à l’équilibre environnementale et écologique de la ville et de la commune. Les Thomassiquois  raffolent la cuisine haïtienne. Mais le plat typique des Thomassiquois est le manioc au ragout de cabri communément appelé « Bouyon Têt Kabrit».

Des octogénaires Thomassiquois font remonter la création de la ville de Thomassique au dernier quadrant du 19e siècle ou au début du 20e siècle. La certitude historique c’est que Thomassique, connu sous le nom original de Thomassico faisait partie du giron espagnol.  Elle devient partie intégrante du territoire haïtien probablement avec le traité de la Sainte Trinité.

Selon une étude dénommée Plan de développement de la Commune de Thomassique, réalisée par le Fonds d’assistance économique et sociale (FAES, 2008), « la localité de Thomassique était rattachée à la République Dominicaine plus précisément à la vallée San Thomé où s’est déroulé bon nombre d’évènements historiques. C’est par le traité Haïtiano-Dominicaine de 1874, sous le gouvernement de Domingue que Thomassique cessera officiellement à l’instar de Thomonde, Hinche et de Cerca Carvajal d’appartenir au pays espagnol ».  Selon des documents officiels, Thomassique fut érigée en quartier sous le gouvernement provisoire de 1889.

De par son emplacement, Thomassique est une zone riche en opportunités. C’est une région  très prospère selon la Commission de Révision de Division Territoriale qui avait  recommandé  dès 1927 au pouvoir central non seulement d’élever le quartier de Thomassique au rang de commune et  mais aussi d’établir un poste douanier dans la zone. Mais les autorités de Port-au-Prince ont trainé leur pied et les Thomassiquois ont attendu plus de 80 ans avant de voir l’installation d’un bureau régional de douane en septembre 2009 dans la zone du Morne Fort. Nous reproduisons ci-dessous les recommandations de la dite commission:

                    Faits :

                    1. Thomassique est un quartier très prospère de la Commune de Hinche;
                    2. Ses recettes croissent d'année en année ;
3. Son centre est à la croisée des chemins de Cerca-la-source, de Hinche et Los Palos, de Thomonde, de Rinconcito et de Banica.

Décision : Les membres de la Commission ont résolu de se ranger à l'avis de la Gendarmerie d'Haïti et de la Préfecture de Hinche qui, l’une à l'insu de l'autre, proposent d'ériger en commune le quartier de Thomassique.

La Commission recommande en outre, de considérer la section de Matelgate comme partie intégrante de la nouvelle commune.
                    27. Etablir un poste de douane sur le territoire de la communede Thomassique, non loin du vieux fort Biassou.

                    Port-au-Prince, le 4 Juillet 1927.

                    Frère HYPPOLITE, Président,
                    Membres : Edmê Manigat, A. Leveéque, Auq. A, Hebeaux, A Scott,Lko

Thomassique conserve le cachet d’un certain héritage hispanique avec notamment des localités qui portent encore de noms de résonnance espagnol (Rio Hondo, Hato Nuevo, Sávana  Mulata, Los Ratones, Don Diego, Boca de Banica,  Los Higueyes, Augustina, Rodeo, Monte Grande, Manantiales, Los Blanquitos, Palma/Las Palmas, Los Guajes, Domingo, Santiago, La Loma de los Guanos, Felipito, Más Allá etc…) et la propension naturelle des Thomassiquois à s’exprimer aisément dans la langue de Cervantès. En dépit de la détérioration des relations haitiano-dominicaines, Thomassique dispose d’une facilité d’échanges culturels et commerciaux avec la République Dominicaine. Les échanges privilégiés avec la république voisine font de la zone le point de ravitaillement par excellence pour les produits tels que le fer, le ciment, la farine, le sucre, etc.  Des octogénaires Thomassiquois interrogés dans le cadre de cet article affirment qu’il y a un lien culturel, une affinité naturelle entre les Thomassiquois et les Dominicains. Selon leur dire, les Thomassiquois originaux possédaient la double nationalité (dominicaine et haïtienne). Ils faisaient usage de l’une ou de l’autre pour se tirer des avantages économiques et commerciaux ou en fonction de la conjoncture politique.

Sur le plan territorial et administratif, Thomassique est repartie en deux sections communales: la section Locianne et la section Matelgate. Ce découpage est à la fois suranné et aberrant, compte tenu de la multiplicité et de l’extension des localités et habitations de la commune. Il serait plus sensé et plus pragmatique de découper la commune en six grandes régions (Bocbanique, Darlegrand, Bouloume, Baranque, Randez-joie, et Malte Péralte). Ces agglomérations sont si importantes qu’il faut penser à les élever au rang de quartier. D’ailleurs Bocbanique et Darlegrand sont des paroisses et ont leur propre curé.

A l’image du pays, la population de Thomassique est relativement très jeune. Selon les données sur la pyramide d’âges de l’Institut haïtien de statistique et d’informatique, reproduites dans le Plan de développement de la Commune de Thomassique«Thomassique présente la structure suivante: 47,0 % sont âgées de moins de 15 ans; 48,8 % entre 15 et 64 ans et 4,2 % de 65 ans et plus. La population féminine est plus importante que la population masculine. Elle représente  50.91 % de la population totale de la commune ».

Thomassique a toujours rendez-vous avec l’histoire en termes d’hospitalité. Elle est la ville accueillante par excellence. C’est  son  cachet historique, son atout concurrentiel défendable. Les Thomassiquois sont sympathiques et très courtois. Ceux qui visitent la ville du père des philosophes peuvent en témoigner. En effet, Thomassique a été le lieu privilégié d’accueil pour de nombreux rescapés lors des vêpres dominicaines orchestrées par le président raciste dominicain Raphael Leonidas Trujillo Molina en 1937. Des  paysans des autres coins du pays en partance pour la zafra dominicaine dans les années 80 ont pu y trouver refuge et se sont établis dans la ville de St Thomas d’Aquin.  Récemment, après le séisme du 12 janvier 2010, nombreux sont des compatriotes des autres départements qui se sont installés à Thomassique en quête d’un milieu plus calme et plus clément.

Il y a lieu de corriger une hérésie historique sur Thomassique.  Cette hérésie initiée par l’Institut haïtien de statistique d’informatique (IHSI) et répétée en chœur et avec paresse par d’autres institutions telles que le Fonds d’assistance économique et sociale (FAES), le Ministère de la Planification, fait remonter la création de la ville de Thomassique sous la présidence de Paul Eugène Magloire.  En effet, selon une source de l’Institut haïtien de statistique d’informatique relayée par l’auteur du Dictionnaire Historique et Géographique des Communes D’Haïti: “La ville de Thomassique a été fondée en 1950 et est élevée au rang de commune en 1954”. C’est archi-faux. En effet l’arrêté du président Sténio Vincent en 1934 nommant une commission communale pour présider aux intérêts de la commune de Thomassique dément avec brio les recherches erronées de l’IHSI. Pour la vérité et pour l’histoire, nous reproduisons in extenso et successivement la loi de 1934 telle que votée par le parlement haïtien et promulguée par le pouvoir exécutif érigeant Thomassique au rang de commune, et l’arrêté pris par le président Sténio Vincent nommant le premier conseil municipal de la ville.

        BULLETIN DES LOIS ET ACTES DE LA REPUBLIQUE D’HAITI

                    LOI
                    LE CORPS LEGISLATIF
Considérant l'importance économique et politique du Quartier de Thomassique par sa population et sa situation sur la frontière Dominicaine;
Considérant l'évolution de ce Quartier érigé en 1889, les productions  financières des droits de Douane et de ses marchés Communaux;

                    A proposé et voté la Loi suivante:
Art. 1er. — -Le Quartier de Thomassique dépendant de la Commune de Hinche est érigé en Commune de Sème classe.
                    Art. 2. — Les limites de cette nouvelle Commune seront celles de l'ancien Quartier.

Art. 3. — La présente Loi abroge toutes lois ou dispositions de loi qui lui sont contraires et sera exécutée à la diligence du Pouvoir Exécutif.

                    Donné à la Maison Nationale, à Port-au-Prince, le 26 Juin 1934, An 131ème de l'Indépendance.
                    Le Président: EDG. F. PIERRE-LOUIS
                    Les Secrétaires: A. BEAUVOIR, HORELLE MONTAS ad hoc. -

                    Donné à la Maison Nationale, à Port-au-Prince, le 26 Juin 1934, An 131ème de l'Indépendance.
                    Le Président: F. MARTINEAU
                    Les Secrétaires: Dr. HECTOR PAULTRE, PIERRE HUDICOURT, ad hoc


                    AU NOM DE LA REPUBLIQUE
Le Président de la République ordonne que la Loi ci-dessus soit revêtue du Sceau de la République,  imprimée, publiée et exécutée.

                    Donné au Palais National, à Port-au-Prince, le 10 Juillet 1934, An 131ème de l'Indépendance.

                    STENIO VINCENT
                    Par le Président :
                    Le Secrétaire d'Etat de l'Intérieur: JH. TITUS


        ARRETE

                    STENIO VINCENT

                    PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
                    Vu l'article 79 de la Constitution ;
                    Vu les articles 31 et 32 de la Loi du 6 Octobre 1881 sur les Conseils Communaux ;
                    Vu la Loi du 10 Juillet 1934 érigeant le quartier de Thomassique en Commune ;
Considérant qu'il importe de pourvoir la nouvelle Commune de Thomassique d'une Administration Communale pour gérer ses intérêts jusqu'aux prochaines élections ;

                    Sur le rapport du Secrétaire d'Etat de l'Intérieur ;
                    ARRETE:
Art. 1er. — Les Citoyens Georges Cantave, Jn-Baptiste Dubuisson, et Samson Ludger sont respectivement nommés Président et Membres de la Commission qui doit gérer les intérêts de la Commune de Thomassique jusqu'aux prochaines élections.
                    Art. 2. — Le présent Arrêté sera publié et exécuté à la diligence du Secrétaire d'Etat de l'Intérieur.

                    Donné au Palais National, à Port-au-Prince, le 31 Août 1934, An 131ème de l'Indépendance.

                    STENIO VINCENT
                    Par le Président :
                    Le Secrétaire d'Etat de l'Intérieur: TH. TITUS

 

               Comme mentionné dans l’article Coup d’œil sur Thomassique publié en juin 2011, «Le hic c’est que le successeur de Vincent, Elie Lescot au nom d’une politique rétrograde au détriment du développement des communes avait par arrêté du 7 Septembre 1942 supprimé le statut de commune de plus d’une douzaine de villes notamment Thomassique.  Autant dire, la fondation de la ville de Thomassique et son statut de commune sont de loin antérieurs à 1950.  Le fait par le gouvernement de Paul Eugène Magloire de rapporter l’arrêté obscurantiste de Lescot n’a rien entamé de l’historicité de la ville de Thomassique ».Il est de bon ton de reproduire l’arrêté réactionnaire et éteignoir du président Elie Lescot supprimant la ville de Thomassique et d’autres villes du pays du rang des communes:

                    ARRETE No. 186

                    ELIE LESCOT

                    PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

                    Vu l'article 35 de la Constitution;

Vu le décret-loi du 29 août 1942, autorisant la suppression de certaines Communes de la République, reconnues inefficientes ;

                    Considérant qu'il importe de mettre en application le susdit décret-loi ;
                    Sur le rapport du Secrétaire d'Etat de l'Intérieur;

                    Arrête :

Article 1er. — A partir du 1er. Octobre 1942, sont et demeurent supprimées les Communes suivantes : Gressier, Savannettes, Ville-Bonheur, Thomassique, Thomonde, La Victoire, Mombin-Crochu, Carice, Acul-Samedi, Grand-Bassin, Les Irois, La Cahouanne, Grand-Boucan., St. -Michel du Sud, Anse-Rouge.

Article 2. — Le présent Arrêté sera publié et exécuté à la diligence des Secrétaires d'Etat de l'Intérieur et des Finances.

                    Donné au Palais National, à Port-au-Prince, le 7 Septembre 1942, An 139ème de l'Indépendance.

                    ELIE LESCOT
                    Par le Président :

                    Le Secrétaire d'Etat de la Justice : VELY THEBAUD
                    Le Secrétaire d'Etat des Finances: ABEL LACROIX

 

L’acharnement du gouvernement de  Lescot à freiner l’essor économique, le développement politique et administratif de certaines communes de la république notamment Thomassique a atteint son paroxysme avec Le décret-loi No. 204. L’article 1er de ce décret dénote le degré d’obscurantisme de ce gouvernement et constitue  la marque déposée de sa politique rétrograde:

A partir du 1er Octobre 1942, les fonctions de Notaires, d’Arpenteurs, d’Officiers dé l’Etat Civil, sont et demeurent supprimées dans les localités suivantes : Grossier, Ville-Bonheur, Thomassique, Thomonde, La Victoire, Mombin-Crochu, Carice, Acul-Samedi, Grand-Bassin, Les Irois, La Cahouanne, Grand-Boucan, St Michel du Sud et l’Anse Rouge.

Thomassique dispose de plusieurs écoles primaires, d’un lycée et de plusieurs collèges privés. En dépit des efforts dans ce domaine, la qualité de l’éducation laisse à désirer. Le Ministère de l’Education Nationale se doit d’intervenir pour relever le niveau de l’éducation.  Pour cela il faut penser à la formation et au recrutement judicieux de professeurs qualifiés, à la construction d’une bibliothèque dotée d’un Centre Multimedia avec au moins 50 ou 100 ordinateurs de bureau et d’une dizaine de laptops; ce qui aura la vertu d’insuffler aux enfants et aux jeunes le sens de la lecture et de la recherche et de l’excellence. Dans la même veine, Thomassique a grand besoin d’une école professionnelle, avec des filières telles la maçonnerie (pour former des contremaitres en technique de construction parasismique), l’électricité, la plomberie/installations sanitaires, la ferronnerie, l’ébénisterie, la haute couture et l’art culinaire, une école moyenne d’agriculture et une école de comptabilité et d’informatique,.

Thomassique est parmi les communes du pays les plus démunies en services sanitaires, en dépit du travail colossal réalisé par les techniciens en soins de santé de la clinique Saint Joseph de l’église catholique. L’accès aux soins de santé représente un véritable casse-tête pour la grande majorité de la population. Pour se faire  soigner,  les Thomassiquois  doivent se rendre  soit  en République Dominicaine,  à l’hôpital «de Bienfaisance de Pignon» ou, à l’hôpital «Sainte Thérèse» de Hinche, à Port-au Prince ou à Zanmi Lasante de Cange ou Cerca-la-Source. L’Etat haïtien se doit de corriger cette injustice par la création d’un centre hospitalier moderne doté d’un service de maternité, de pédiatrie, de salles d’urgence, d’une clinique d’obstétrico-gynécologique, d’un service de laboratoire, et d’un personnel médical qualifié.

Actuellement, la commune et la ville font face à une pénurie d’eau potable. L’approvisionnement de la population de Thomassique en eau potable est partiel et insuffisant.   La Direction nationale d’eau potable et d’assainissement (DINEPA) se doit d’intervenir en vue d’améliorer ou de rénover le système d’adduction d’eau potable construit depuis 1978 et légué en héritage à la communauté par le curé belge de regretté mémoire, Marc Fivez, à qui toute la communauté Thomassiquoise devait être reconnaissante. Durant son ministère, Père Marc Fivez a doté Thomassique de pas mal d’infrastructures de base: Ecole primaire en 1968, dispensaire et système électrique en 1973, système d’adduction d’eau potable en 1978, percée de routes reliant les différentes localités telles que Bocbanique/Thomassique, Darlegrand/Thomassique, Bouloume/Thomassique et Baranque/Thomassique). Pour éviter l’isolement de Thomassique du reste du pays durant les saisons pluvieuses, il engageait des hommes armés de pelles,  de piquoirs et d’autres outils d’entretien pour travailler sur les route Hinche/Thomassique et Thomassique/Cerca-La-Source. Même l’Ecole Nationale de Thomassique doit son existence grâce  au dévouement et à la diligence du Père Marc Fivez.

 

Père Marc Fivez n’était pas seulement le curé de Thomassique, il était un homme progressiste, un véritable agent de développement. Sous sa houlette, des agriculteurs furent groupés au sein d’une coopérative communautaire pour la culture à grande échelle des produits de première nécessité tels que le riz, la figue-banane, le pois, le manioc, le petit-mil, l’arachide et la canne à sucre.  Il a fait venir à la ferme de Malte-Péralte un cheptel de vaches (Brown Swiss) pour la production du lait en faveur de la communauté.  A la fin  des années 70, il a fondé un atelier où des femmes venues de tous les coins et recoins de la commune travaillaient à la main pour confectionner de beaux tapis et divers autres travaux d’artisanat. Chaque année il organisait à  l’Institut Français à Port-au- Prince une grande exposition des travaux en artisanat réalisés par ces valeureuses dames venues de Thomassique et on savait même exporter ces œuvres à l’étranger. Ce genre d’activités avait donné une grande visibilité à la ville de Thomassique et constituait une source de revenu pour les habitants de Thomassique en particulier et un flux de devise pour le pays en général. Mais malheureusement après les évènements de 86, les bouleversements politiques et les conflits d’intérêt entre groupes rivaux ont tout chambardé. Le non-suivi des projets initiés dû à ce climat de tension a été préjudiciable au développement continu de la ville.

 

En dépit de son statut de ville commerciale, les services bancaires font défaut à Thomassique. La Unibank, la Sogebank et la Banque Nationale de Crédit (BNC) doivent se mettre à pied d’œuvre pour l’installation d’une succursale bancaire dans cette ville. L’implantation d’une banque commerciale et de développement avec une filière spécialisée pour financer les activités agricoles et les petites et moyennes entreprises (PME) apportera un nouveau souffle à l’économie de la zone. La banque qui fera le premier pas pour la concrétisation d’un tel projet aura la part de lion dans ce marché.

Si la couverture de la région en termes de téléphones cellulaires par la Digicel est  plus ou moins satisfaisante, les installations de fibres optiques de la Natcom se font attendre.  Les Thomassiquois attendent impatiemment les prestataires de services d’internet pour se mettre au parfum des nouvelles  technologies de l’information et de la communication.

Le transport public dans la zone se fait généralement par voie terrestre. Les Routes Hinche/Thomassique et Thomassique /Cerca-La-Source sont en terre battue. C’est un véritable casse-tête pour les camionneurs et les voyageurs qui doivent emprunter ces routes très poussiéreuses durant la saison sèche, cahoteuses et boueuses en saison pluvieuse.  Les travaux de réfection ou de réparation qui se font actuellement sur ce tronçon de route facilitent certes la circulation des personnes et des biens, mais ne sont qu’un palliatif au problème crucial de transportation au niveau de la zone. Il y a lieu d’envisager des solutions  plus durables telles que le bétonnage ou  l’asphaltage.   En effet, l’asphaltage de la route Hinche/ Thomassique/Cerca La Source jusqu’au terminus de la route internationale sur les hauteurs de Los Cacaos, localité limitrophe à la ville dominicaine Pedro Santana, apportera un brin de développement dans la zone.

En dépit des potentialités de la zone, le pouvoir central de Port-au-Prince n’a pas toujours été bienveillant envers Thomassique. Comme on vient de le voir, le gouvernement d’Elie Lescot     avait tout fait pour brimer l’essor multisectoriel de la commune. Le rattachement électoral de Thomassique sous les Duvalier aux circonscriptions successives de Maïssade et de Cerca-La Source a pesé lourd dans le retard développemental de la zone. Malgré les soubresauts de toute part et de tout ordre, Thomassique reste et demeure une ville résiliente, une ville en pleine expansion. De par sa situation stratégique et frontalière, elle détient un statut de ville commerciale par excellence.  La récente électrification de la ville vient d’ajouter à son degré de compétitivité.  Depuis la loi électorale de 2008, la commune de Thomassique devait constituer à elle seule une circonscription électorale.  Cette disposition n’a pas été opérationnelle lors des dernières élections.  La loi électorale de 2013 vient de faire justice à la commune et à la ville frontalière, la ville commerciale et dynamique de Thomassique d’être une circonscription unique. Cette loi vient de marquer la fin de la représentation duale et tronquée sous laquelle croupit Thomassique depuis des lustres. Mieux tard que jamais.

Mais des défis de taille sont encore à relever pour cette ville qui bouge. En tant que ville intérieure qui ne se donne sur la mer, Thomassique doit se positionner comme une ville écologique, un espace vert,  une une ville arborée.   Pour ce faire, tout projet d’extension de la ville ou des banlieues doit se faire en fonction d’un schéma d’aménagement communal, un plan directeur d’urbanisme avec identification des rues et des maisons. Il faut un plan de construction d’une nouvelle Thomassique dotée d’un jardin botanique,  avec rues  espacées munies de séparateurs et de rideaux boisés, d’un parc communal pourvu d’une aire récréative avec (chemins balisés, un parc de jeux pour enfants) une boucle à vélo tout terrain et une cour de marchepour  les activités en plein air et pour permettre aux jeunes de faire de l’exercice physique. Les nouvelles constructions doivent se faireau regard des règlements de zonage et d’alignement pour permettre des projets éventuels d’agrandissement des rues. Les maisons en banlieue doivent être ornées ou munies d’une couverture boisée (gazon, jardins, parterre, arbres fruitiers) pour protéger le sol contre l’érosion par ruissellement.  Il faut tout un train de mesures pour freiner la coupe abusive des arbres en encourageant l’usage de fours électriques ou bombonnes à kérosène.

Les données historiques dont nous disposons ne permettent de fixer une date précise quant à la fondation de la localité de Thomassique. Les décrets et arrêtés notamment ceux de 1889 et de 1934 qui consacrent tour à tour son statut de quartier et de commune n’ont  rien écorné de l’historicité de la zone. D’ailleurs, Thomassique existait bien avant l’unification de l’ile en 1822 et la sécession qui s’ensuivait en février 1844. Cependant, l’incorporation de Thomassiqueau territoire haïtien est d’une valeur symbolique et historique.  Cela remonte vraisemblablement au traité de la Sainte Trinité. Bien que ratifié par le parlement haïtien le 9 décembre 1874, ce traité fut signé et promulgué le 20 janvier 1875 par le président Michel Dominique. De ce fait, le 20 Janvier 1875 devient une date charnière dans l’histoire de Thomassique.  Il y a lieu de considérer cette date  comme un point de départ pour Thomassique en attendant que des documents historiques fiables viennent prouver le contraire. Fort de cela, il est impérieux de former un comité pour la commémoration des 140 ans de la fondation de la commune de Thomassique. Les festivités débuteront le 20 janvier 2015 et s’étendront sur une semaine. Les autorités politiques et religieuses profiteront de ce grand événement qui correspondra certainement à la fête patronale du 28 janvier pour ériger et dévoiler un buste à l’effigie du Père Marc Fivez, considéré à juste titre comme l’ami et le bienfaiteur par excellence de la ville et de la commune de Thomassique.

 

Ives Isidor/ ives.isidor@yahoo.com

27 janvier 2014

Référence

Fonds d’Assistance Economique et Sociale. (2008) .Plan de Développement de la Commune de Thomassique

 

Joseph, Prophète. (2003). Dictionnaire Historique et Géographique des Communes D’Haïti. (2e éd.). Port-au Prince : Éditions Combit.

 

Isidor, Ives.  Coup d’œil sur Thomassique.  Juin 2011                                     http://www.scribd.com/doc/61574227/Coup-d’œil-sur-Thomassique

 

Bulletin des Lois et Actes  de la République d’Haïti http://www.archive.org/stream/bulletindesloise03hait/bulletindesloise03hait_djvu.txt

 

Journal Le Moniteur. 31 Aout1934

 

Journal Le Moniteur. 7 Septembre1942

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