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Débat linguistique -Kreyòl, Kreyòl Ayisyen, ou Ayisyen : Quand le linguiste Michel Degraff dérape

Boston – 1er Novembre 2021 – Par Yves Cajuste –  L’appellation de la langue parlée par tous les haïtiens nés et vivant en Haïti est un débat récurrent entre linguistes et intellectuels. De nombreux articles assez intéressants et instructifs ont été publiés sur ce sujet, au cours de ces dernières années,  sur des médias en ligne , dans les Quotidiens Le Nouvelliste et Le National.

Cependant,  ce qui est parfois dérangeant dans ces échanges qui traduisent un intérêt certain pour cette langue c’est l’utilisation  de ce débat purement linguistique à d’autres fins très souvent personnelles.

A l’occasion de la Journée Internationale du créole le 28 Octobre dernier, le quotidien “Le Nouvelliste a publié en “première page” un article de Patrice Dumont “Ayisyen  se non lan nou pale a “ dans lequel il relance le débat sur l’appellation de notre langue nationale et co-officielle. Réagissant aux arguments avancés par l’écrivain et professeur d’histoire Dumont, Michel Anne-F. DEGRAFF, académicien (Akademi Kreyòl Ayisyen) et professeur de linguistique à la prestigieuse MIT (Massachusetts Institute of Technology), était véritablement d’attaque pour s’en prendre  et au Quotidien, et à son Rédacteur en Chef et au “Senatè  Patris Dimon »

Jounen jodi a pandan yon «Mwa kreyol » ki ta dwe dire 365 jou nan ane a, Frantz Duval nan jounal frankofòl Le Nouvelliste Haiti, k ap devalorize lang nasyonal la tou lè jou, deside pibliye yon atik Sénateur Patrice Dumont k ap devalorize non lang kreyòl la ! 

Dans cette longue phrase de 47 mots qui sert d’introduction à la tirade du Directeur de MIT-INITIATIVE-Haïti aucune argumentation mais plutôt des flèches dans toutes les directions contre des adversaires, des “colons qui veulent dévaloriser, chaque jour, notre langue nationale.

Pathétique diraient certains mais ceux qui ont le privilège de savourer la “production tout à fait prolifique”  de l’éminent professeur de Linguistique à MIT vous diront le contraire.  “Dessalines, Racine, Nationaliste, Nationalisme, Dévaloriser, Vertières, A l’Assaut ….” constamment dans ses commentaires presque quotidiens sur les réseaux sociaux. On peut à propremenr parler d’un style “DeGraff” dans la défense de notre langue nationale. Pour lui, aucune  cohabitation possible entre les deux langues officielles du pays. (Mwa Kreyòl la te dww dire 365 jou nan ane).

Il faut souligner que le brillant linguiste est à la fois moqueur, créatif, un peu méchant parfois mais heureusement dôté d’un style imagé. (MDR). “Frankofòl” est ce nouvel adjectif créé (inventé puisqu’on parle d’un prof de MIT) par l’académicien-linguiste pour désigner tous ceux qui, oubliant leurs racines africaines, font usage de la langue du “colon” pour exprimer leurs idées dans les médias, écrire des pièces de théâtre, des films, des livres    …… contribuer à la production littéraire haïtienne. A souligner que de brillants intellectuels haïtiens de renommée mondiale produisent des oeuvres littéraires dans nos deux langues officielles (le français et le créole).

Dans une langue aussi imagée que notre créole (je choisis votre camp MONSIEUR LE PROFESSEUR en utilisant  cette appellation et non Aysisyen), on peut déceler dans l’adjectif frankofòl (en le décomposant) toute l’ingéniosité de l’éminent académicien-linguiste. Un “franko” est un compatriote qui se croit “Français” donc à la fois “Blanc” et “Colon”. Nan bon jan kreyòl, frankofòl se yon konpatryòt Ayisyen ki gen foli blan fransè paske l ap pale fransè. Un “frankofòl est un compatriote qui se prend pour un Français parce qu’il route les RRRRRRRRR. (MDR).

Alors, j’ai une modeste suggestion pour l’éminent académicien-linguiste : kranglofòl est un compatriote vivant aux Etats-Unis qui “use a lot of words” pour s’exprimer en créole. Le substantif serait alors “kranglè”.

Pour revenir à la longue phrase sus-citée,  l’éminent académicien-linguiste Michel Anne-F. DEGRAFF utilise à deux reprises le verbe “devalorize”.

Frantz Duval nan jounal frankofòl Le Nouvelliste Haiti, k ap devalorize lang nasyonal la tou lè jou”, dans ce segment, l’éminent  professeur de MIT s’en prend directement au Rédacteur en Chef de Le Nouvelliste. Le sujet du verbe “devalorize” est clairement Frantz Duval. En français, une virgule serait placée avant la préposition “nan”. La création de ce quotidien remonte à 1898 (123 ans). Nous avons attendu plus de trois décennies avant de mettre en application des recommendations et travaux de la réforme Bernard. Akademi Kreyòl Ayisyen n’a vu le jour que tout récemment (2014) après plusieurs années de débat houleux notamment sur la graphie des mots, l’alphabet et la grammaire de cette langue. Pour écrire dans une langue, il faut que les règles de grammaire et d’orthographe existent. D’autre part, n’écrit pas qui veut.

Qui seraient lors ces journalistes, éditorialistes de Le Nouvelliste “patriote-dessalinien-nationaliste et non-frankofòl” tel que voulu par notre éminent académicien linguiste ?
Même après la création de Akademi Kreyòl Ayisyen, le créole peine encore à s’imposer pour de multiples raisons : préjugé à l’égard de cette langue, absence d’une politique linguistique définie par cet Etat (qui n’existe pas), absence de financement des pouvoirs publics …

Soyons honnête Monsieur le Professeur, en Haïti le CREOLE ne nourrit pas l’apprenant. L’Administration publique et le secteur privé fonctionnent en français, si vous me permettez l’expression. On n’embauche pas dans les Cabinets de nos Ministres, de nos Sénateurs, de nos Députés et de nos DG le jeune qui écrit en créole. Ceux qui sont embauchés à titre de Consultants dans les boîtes de l’Etat, à prix fort, vous le savez comme moi, cher Professeur, “pondent” leur document en français. Tous les documents importants de l’Administration publique haïtienne sont rédigés en français. Visitez le site de la Banque centrale (brh.ht), la Banque des Baques, pour avoir une idée. A part une vidéo-clip (Istwa Goud la). Tout est en français. Imaginez un jeune économiste haïtien qui ne maîtrise pas la langue du “colon” et qui brigue un poste à la Banque Centrale,  à la Primature, au Ministère des Affaires Etrangères …. par exemple!  Les documents sur la politique monétaire, l’environnement macro-économique,  les Plan d’action pour le Relèvement et le Développement d’Haïti  du Ministère du Plan et de la Coopération Externe ne sont pas rédigés en créole.

En un mot, le français ouvre les portes de l’emploi en Haïti.  La faute n’est pas au Le Nouvelliste ou à son Rédacteur en Chef. La réalité est celle qu’elle est chez nous. Il faut la regarder en face. Ce n’est pas une réalité (si triste soit-elle). C’EST LA  REALITE. It is what it is.

Les flèches lancées par l’éminent académicien-linguiste pourraient atteindre ces “frankofòls” dans le contexte d’un média audiovisuel puisque tous les haïtiens nés, éduqués et vivant en Haïti (dans presque leur majorité) parlent notre langue nationale.
Puique l’article incriminé a été publié dans la presse écrite, le brillant professeur de MIT est passé clairement à côté de ses cibles.

Patris Devil” (Patrice Démon)

https://m.facebook.com/791208871/posts/10159745316338872/?d=n

L’article en question de Patrice Dumont, écrivain et professeur d’Histoire, publié dans Le Nouvelliste à la fin du mois dernier, relançant le débat sur l’appellation de notre langue nationale à l’occasion du Mois du Créole, relève tout simplement du champ linguistique. En quoi la plublication de l’argumentaire de Patrice Dumont sur un sujet d’intérêt national “dévalorise-t-elle” cette langue. Pourquoi ce jeu de mot en Anglais et en Créole “Senatè « Patris Dimon » (èske se kon sa l ekri non l nan paspò li ?”. En Anglais, la traduction faite (par l’éminent professeur) est même cruelle “Patris Devil” (Patris Démon).

Soyons sérieux. Un peu de hauteur, cher professeur, dans ce débat qui pourrait être assez instructif pour tous ceux qui s’intéressent au développement du créole auquel vous vous engagez, patriotiquement, corps et âme, sur les réseaux sociaux et à travers l’extraordinaire projet MIT-HAITI INITIATIVE pour une éducation “Tèt anwo” dans notre pays.

Un professeur de Linguistique dans une prestigieuse université américaine qui s’amuse à faire des jeux de mots avec le nom de famille d’un compatriote ?  Il faut avoir “beaucoup de temps libre” dans une journée au sein de cette institution académique pour s’adonner à de tels exercices quelque peu embarassants. It’s not funny at all.  On peut porter à longueur de journée ce foulard multicolore ( symbole de ses origines africaines- rasin wi ) à défaut de la traditionelle cravate occidentale du “colon blanc” et ne pas avoir pour autant les talents d’un comédien.

Je me demande d’ailleurs si on a le droit de traduire les noms propres d’une langue à une autre.  Oui nous dit le grammairien belge francophone Maurice Grévisse qui, dans son ouvrage “Le Bon Usage”, les classe en plusieurs catégories dont les noms propres de personnes (les anthroponymes). Le célèbre grammairien précise qu’on peut les traduire dans le cas de personnages historiques. Patrice Dumont, sénateur de la République certes pas un personage historique.

“Patris Devil” (Patrice Démon) est à la fois moqueur et puéril. Moqueur parce que l’éminent linguiste sait qu’on ne traduit pas les noms propres de personnes. Puéril pace que sa traduction n’apporte rien au débat linguistique en question.

Analiz senatè a sanble ak yon analiz kolonyal ki derefize rekonèt endepandans lang kreyòl la kòm lang ki pa rete an ba bòt lang franse. 

Même quand l’éminent académicien-linguiste tente de ramener le débat sur son propre terrain (celui de la linguistique qu’il maîtrise), il déraille piteusement en arborant son costume nationaliste pour  mettre en difficulté (pense-t-il) tout sénateur qui refuse de reconnaître l’indépendance de la langue créole qui, rappelle-t-il, ne gémit plus sous les bottes de la langue française. Profesè a ap depose, ap mete nan men Senatè ki reprezante Rassemblement des Patriotes Haïtiens (RPH) au Sénat de la République. Nous ne faisons que traduire, presque mot pour mot ce qu’a exprimé le brilliant professeur de Linguistique à MIT dans sa “Défense de la Langue Créole”. Un ouvrage en préparation, peut-être ?

Pour conclure sa tirade, l’éminent académicien-linguiste ratisse large dans ses attaques : colon blanc, colon local, Ministère de l’Education Nationale, Université d’Etat d’Haïti, Le Nouvelliste e latrye (MDR)

« Kreyòl pale, kreyòl konprann ! » — sa se pawòl Ayisyen, wi ; se pa pawòl kolon blan.  Jounen jodi a, kolon blan ak kolon lokal yo se « franse pale, franse konprann » y ap defann — ata nan kourikoulòm ak tout lòt kominikasyon MENFP HAITI Officiel, Université d’Etat d’Haiti UEH, Le Nouvelliste, e latriye.

Le langage agressif et acide de l’éminent académicien-linguiste crée beaucoup de malaise dans les milieux éducatifs haïtiens en Haïti comme à l’étranger. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour la langue créole car l’éminent linguiste a beaucoup à offrir mais certains de ses collègues le considèrent comme indésirable. Nan bon jan kreyòl yon demeplè”. “Si misye sa a ap nan emisyon an, mwen pa landan l”, menacent très souvent des intellectuels invités à participer à des débats sur notre langue nationale.

Journée Internationale de la langue Créole 2021

En dépit des restrictions mises en place à l’échelle planétaire pour limiter les rassemblements publics, des organisations et intitutions haïtiennes (notamment basées à l’étranger ont célébré “le Mois du Créole ” par de nombreuses manifestations socio-culturelles. Ici, dans le Massachusetts, le Groupe de Promotion du Créole et de la Culture haïtienne avait retrouvé le samedi 30 Octobre son public en mode virtuel et en présentiel pour son traditionnel “Chiktay literè” au Forever Young Adult Day à Hyde Park (Boston). Au menu : artistes, écrivains, poètes, conteurs locaux dont Charlot Lucien, Tontongi, Danielle Legros Georges, Mirlande Butler, Fred E Lafortune ….. et comme invité spécial le parolier et dramaturge Jean-Claude Martineau via visioconférence depuis Montreal (Canada).

Le dimanche 31 Octobre, à New-York, l’Institut des Etudes Haïtiennes de CUNY (City University of New-York) a bouclé un symposium de  trois (3) jours  sur le créole (langue) et la culture haïtienne.

Il faut également mentionner dans le cadre de la célébration du Mois du Créole plusieurs initiatives de Sosyete Koukouy (Canada, Floride, Connecticut ….) SANT N A RIVE à Montreal.

A défaut d’un thème central de célébration, deux points majeurs ont marqué particulièrement les débats entre académiciens, enseignants, écrivains, éditeurs de matériels éducatifs en créole : les travaux réalisés depuis la création de AKA (Akademi Kreyòl Ayisyen) en 2014 et surtout les obstacles au développement de cette langue langue officielle et nationale dans les milieux scolaires faute de financement et de volonté manifeste des pouvoirs publics.

Au niveau des médias (radio et télévision particulièrement) des émissions spéciales ont été organisées notamment à l’occasion de la journée internationale du créole le jeudi 28 Octobre dernier.

 

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